1
00:00:05,750 --> 00:00:10,680
Paragraphe 3 : La répartition des
résultats entre les associés  Alors,

2
00:00:10,880 --> 00:00:14,240
comment sont répartis ces résultats
auxquels tous les associés doivent

3
00:00:14,440 --> 00:00:15,200
participer ?

4
00:00:15,400 --> 00:00:16,160
Comment sont répartis les bénéfices ?

5
00:00:16,360 --> 00:00:17,360
Comment sont réparties les pertes ?

6
00:00:17,990 --> 00:00:20,930
Il y a un principe, puis,
nous allons voir qu'il existe des

7
00:00:21,130 --> 00:00:21,890
exceptions.

8
00:00:22,090 --> 00:00:23,270
Donc, commençons par le principe. 

9
00:00:24,740 --> 00:00:25,500
A.

10
00:00:25,700 --> 00:00:28,490
Le principe  C'est l'article 1844-1
du Code civil qui énonce la règle

11
00:00:28,690 --> 00:00:34,010
que la part de chaque associé dans
les bénéfices et dans la contribution

12
00:00:34,210 --> 00:00:39,200
aux pertes se détermine à proportion
de la part dans le capital social.

13
00:00:39,400 --> 00:00:42,620
Donc, plus vous avez fait d'apports,
plus vous avez de parts dans le

14
00:00:42,820 --> 00:00:47,960
capital social, plus vous êtes
titulaire, vous allez participer

15
00:00:48,160 --> 00:00:51,050
aux bénéfices et plus vous allez
contribuer aux pertes,

16
00:00:51,290 --> 00:00:53,780
ce qui est logique parce que vous
contribuez en perdant votre apport.

17
00:00:53,980 --> 00:00:59,360
Donc, vous contribuez naturellement
à proportion de l'apport que vous

18
00:00:59,560 --> 00:01:00,320
avez réalisé.

19
00:01:01,790 --> 00:01:06,680
Il faut préciser tout de même que
l'apporteur en industrie est soumis

20
00:01:06,880 --> 00:01:10,700
à une règle particulière parce
que comme il ne participe pas au

21
00:01:10,900 --> 00:01:14,060
capital social - je vous le rappelle
- l'apporteur en industrie participe

22
00:01:14,260 --> 00:01:20,840
au résultat dans les proportions
identiques à celui des associés

23
00:01:21,040 --> 00:01:23,750
qui ont le moins apporté,
sauf clause statutaire contraire.

24
00:01:23,950 --> 00:01:29,240
Donc, si vous êtes un associé qui

25
00:01:29,440 --> 00:01:33,380
a apporté 10% du capital social,
vous allez recevoir 10% des bénéfices

26
00:01:33,580 --> 00:01:36,580
et vous contribuerez à 10% des pertes.

27
00:01:36,780 --> 00:01:38,330
Voilà la règle de principe.

28
00:01:38,660 --> 00:01:43,340
Mais à cela, il y a des exceptions
ou plutôt une exception générale

29
00:01:43,540 --> 00:01:45,830
avec plusieurs déclinaisons,
ce que nous voyons dans un grand B. 

30
00:01:46,310 --> 00:01:47,070
B.

31
00:01:47,270 --> 00:01:50,990
Les exceptions  C'est l'article
1844-1 du Code civil qui précise

32
00:01:51,190 --> 00:01:55,070
que la répartition en fonction
de la part dans le capital social

33
00:01:55,270 --> 00:01:57,050
n'est pas d'ordre public.

34
00:01:57,320 --> 00:02:00,860
Les statuts peuvent déroger à cette
règle.

35
00:02:01,060 --> 00:02:03,910
Donc, vous pouvez tout à fait prévoir
que même si vous avez apporté 20%

36
00:02:04,160 --> 00:02:07,190
du capital social, vous avez droit
à 40% des bénéfices.

37
00:02:07,460 --> 00:02:08,810
C'est tout à fait possible.

38
00:02:09,010 --> 00:02:14,420
Mais, il y a tout de même une limite
à cette exception, à cette dérogation

39
00:02:14,620 --> 00:02:15,380
possible.

40
00:02:15,580 --> 00:02:19,340
Cette limite, c'est la limite de
ce qu'on appelle les clauses léonines.

41
00:02:19,540 --> 00:02:21,290
Alors, pourquoi on parle des clauses
léonines ?

42
00:02:21,560 --> 00:02:26,360
Pour revenir à la fable d'Ésope
qui a été reprise par La Fontaine,

43
00:02:26,960 --> 00:02:31,010
la fable de la chèvre,
de la génisse, de la brebis et du lion.

44
00:02:31,460 --> 00:02:34,100
En fait, l'histoire,
pour la résumer, c'est qu'il y

45
00:02:34,300 --> 00:02:41,320
a un cerf qui est trouvé dans le
lac de la chèvre et ils se demandent

46
00:02:41,520 --> 00:02:45,710
- ces quatre animaux - comment
répartir le corps du cerf entre

47
00:02:45,910 --> 00:02:46,670
les quatre animaux ?

48
00:02:47,900 --> 00:02:50,180
A supposer qu'une brebis,
une chèvre et une génisse sont

49
00:02:50,380 --> 00:02:53,330
intéressées par le fait d'avoir
de la viande de cerf.

50
00:02:53,530 --> 00:02:55,370
Mais bon, peu importe,
ce n'est pas ça qui compte.

51
00:02:55,570 --> 00:02:59,000
Donc, dans la fable,
le lion procède au partage et il

52
00:02:59,200 --> 00:03:02,250
dit que la première part est pour
lui parce qu'il est Sire.

53
00:03:02,450 --> 00:03:04,850
La deuxième, c'est parce qu'il
est le plus fort.

54
00:03:05,050 --> 00:03:08,270
La troisième, c'est parce qu'il
s'appelle lion et la quatrième,

55
00:03:08,470 --> 00:03:13,970
si l'un de ses co-associés essaie
de la prendre, il l'étrangle.

56
00:03:14,170 --> 00:03:19,450
Bref, c'est ça la part du lion,
d'où l'expression « clause léonine »

57
00:03:19,650 --> 00:03:20,410
.

58
00:03:20,610 --> 00:03:24,740
En fait, ce que le législateur prohibe,
c'est que les associés prévoient

59
00:03:24,940 --> 00:03:29,270
qu'un associé bénéficie de tous
les bénéfices ou alors qu'un associé

60
00:03:29,470 --> 00:03:30,680
soit exonéré de toutes les pertes.

61
00:03:31,760 --> 00:03:36,260
Autres clauses qui seraient prohibées,
le fait qu'un associé soit écarté

62
00:03:36,460 --> 00:03:41,240
de tous les bénéfices ou au contraire,
se voit reconnaître,

63
00:03:41,440 --> 00:03:45,020
doive contribuer à l'intégralité
des pertes.

64
00:03:45,650 --> 00:03:49,040
Ce sont des clauses léonines,
ces quatre hypothèses de clauses

65
00:03:49,240 --> 00:03:50,000
léonines.

66
00:03:50,200 --> 00:03:53,930
Alors, en pratique, on ne rencontre
pas de telles hypothèses caricaturales.

67
00:03:54,350 --> 00:03:59,660
La question s'est posée souvent
pour des actes extérieurs à la société,

68
00:03:59,860 --> 00:04:03,290
des actes extérieurs aux statuts,
des actes extra-statutaires et

69
00:04:03,490 --> 00:04:08,540
en particulier, des promesses d'achat
ou de cessions d'actions.

70
00:04:08,740 --> 00:04:13,970
Donc, là, il faut distinguer plusieurs
cas dans lesquels ces situations

71
00:04:14,170 --> 00:04:14,930
sont posées.

72
00:04:15,130 --> 00:04:19,180
La règle générale, c'est de constater
que la Cour de cassation s'est

73
00:04:19,910 --> 00:04:23,510
engagée dans des raisonnements
extrêmement complexes pour,

74
00:04:23,710 --> 00:04:28,100
au final, considérer en toute hypothèse
que les différentes opérations

75
00:04:28,300 --> 00:04:31,940
étaient valables et ne contrevenaient
pas à l'article 1844-1 du Code civil.

76
00:04:32,210 --> 00:04:35,180
On va voir par la suite que peut-être
qu'il aurait été opportun d'adopter

77
00:04:35,380 --> 00:04:38,090
des raisonnements un petit peu
plus simples au lieu de procéder

78
00:04:38,290 --> 00:04:42,590
à ces circonvolutions quelque peu
inutiles et sources de confusions.

79
00:04:42,790 --> 00:04:46,370
Donc, d'abord, la première question
qui s'est posée, c'est celle qui

80
00:04:46,570 --> 00:04:49,370
correspondait à l'hypothèse d'une
cession de contrôles échelonnés

81
00:04:49,570 --> 00:04:50,330
dans le temps.

82
00:04:50,530 --> 00:04:52,100
Donc, cela suppose que je vous
explique plusieurs choses pour

83
00:04:52,300 --> 00:04:53,270
que vous compreniez de quoi il
s'agit.   

84
00:04:53,470 --> 00:04:55,460
Une cession de contrôle,
c'est quoi déjà ?

85
00:04:55,760 --> 00:05:00,110
C'est quand vous cédez suffisamment
de parts ou d'actions pour que

86
00:05:02,390 --> 00:05:05,600
la personne qui achète les parts
ou les actions détienne le contrôle

87
00:05:05,800 --> 00:05:07,940
de la société, c'est-à-dire dans
la majorité des cas,

88
00:05:08,140 --> 00:05:12,980
ait au moins 50% et plus de 50%
des parts ou des actions de la société.

89
00:05:13,180 --> 00:05:15,290
Donc, il est majoritaire,
il a le contrôle de la société.

90
00:05:15,490 --> 00:05:17,040
Donc ça, c'est une cession de contrôle.

91
00:05:17,240 --> 00:05:21,140
On a déjà évoqué cela quand on
parlait des actes de commerce.

92
00:05:21,340 --> 00:05:24,350
Je vous avais dit que les cessions
de contrôle sont des actes de commerce,

93
00:05:24,550 --> 00:05:25,310
en toute hypothèse.

94
00:05:25,510 --> 00:05:27,830
Donc, la cession de contrôle,
c'est quand vous cédez suffisamment

95
00:05:28,030 --> 00:05:31,580
d'actions ou de parts sociales
pour transférer le contrôle à

96
00:05:31,780 --> 00:05:32,540
l'acquéreur.

97
00:05:32,990 --> 00:05:36,290
La gestion de contrôle échelonnée
dans le temps, c'est quand vous

98
00:05:36,490 --> 00:05:38,090
procédez en plusieurs temps.

99
00:05:38,290 --> 00:05:40,580
Vous ne vendez pas toutes les parts
sociales ou toutes les actions

100
00:05:40,780 --> 00:05:41,540
en une seule fois.

101
00:05:41,860 --> 00:05:44,720
Celui qui était aux commandes de
la société vend d'abord la majorité

102
00:05:44,920 --> 00:05:49,460
des parts sociales et puis ensuite,
il reste et il conserve une minorité

103
00:05:49,660 --> 00:05:53,210
de parts ou d'actions dans la société
pour avoir un pied dans la société

104
00:05:53,410 --> 00:05:56,720
et continuer notamment à pouvoir
donner des conseils à l'acquéreur

105
00:05:56,920 --> 00:05:57,950
du contrôle de la société.

106
00:05:58,150 --> 00:06:00,560
Donc, il accepte de rester un peu
plus longtemps dans la société

107
00:06:00,760 --> 00:06:02,270
en détenant une part minoritaire.

108
00:06:02,470 --> 00:06:07,310
Mais, il accepte avec une garantie,
c'est-à-dire qu'on lui a garanti

109
00:06:07,510 --> 00:06:11,480
qu'on lui rachèterait le reliquat
des actions ou des parts sociales

110
00:06:11,680 --> 00:06:13,490
qu'il détient à un prix plancher.

111
00:06:13,690 --> 00:06:18,940
Donc, il est prévu qu'il va recevoir

112
00:06:19,140 --> 00:06:22,120
un prix minimum pour le rachat
des actions ou des parts sociales

113
00:06:22,320 --> 00:06:25,630
qu'il a acceptées de conserver
pour garder un pied dans la société.

114
00:06:25,830 --> 00:06:27,760
Donc, il a rendu un service,
on lui rend un service,

115
00:06:27,960 --> 00:06:28,720
il va recevoir.

116
00:06:28,920 --> 00:06:32,200
Par exemple, si les actions au
moment de la cession de la majorité

117
00:06:32,400 --> 00:06:37,300
des parts ou des actions valaient 100,
l'acquéreur des actions ou des

118
00:06:37,500 --> 00:06:41,590
parts sociales s'engage à racheter
le reliquat pour un minimum de

119
00:06:41,790 --> 00:06:42,820
100 euros, par exemple.   

120
00:06:43,020 --> 00:06:49,840
Le problème, la question s'est
posée en pratique lorsque celui

121
00:06:50,040 --> 00:06:55,180
qui s'était engagé, qui avait promis
de racheter les parts ou les actions

122
00:06:55,540 --> 00:06:59,440
restantes à un prix plancher,
qui avait accordé ce qu'on appelle

123
00:06:59,640 --> 00:07:05,770
une promesse d'achat,
ne veut plus, n'accepte plus de

124
00:07:07,330 --> 00:07:09,850
respecter cet engagement,
de respecter cette promesse.

125
00:07:10,050 --> 00:07:15,610
Donc, il a refusé de payer le prix

126
00:07:16,150 --> 00:07:19,000
des actions ou des parts sociales
qui avaient été conservées par

127
00:07:19,200 --> 00:07:24,970
le vendeur du contrôle de la société
et il lui a bien fallu qu'il trouve

128
00:07:25,170 --> 00:07:25,930
un argument.

129
00:07:26,130 --> 00:07:31,360
Donc, les avocats de cette personne
qui était de mauvaise foi ont trouvé

130
00:07:31,560 --> 00:07:37,210
dans l'article 1844-1 ou pensé
trouver dans l'article 1844-1 du

131
00:07:37,410 --> 00:07:42,550
Code civil un argument pour remettre
en cause la promesse d'achat qui

132
00:07:42,750 --> 00:07:46,330
avait été volontairement et en
toute connaissance de cause consentie

133
00:07:46,530 --> 00:07:48,040
par l'acquéreur du contrôle de
la société.

134
00:07:48,240 --> 00:07:51,670
Mais, là, il s'était dit pourquoi
racheter les parts qui restent,

135
00:07:51,870 --> 00:07:52,880
parce que je n'en ai pas vraiment
besoin.

136
00:07:53,080 --> 00:07:55,630
En plus, je me suis engagé à un
prix plancher de 100 euros.

137
00:07:55,830 --> 00:07:58,930
Imaginez, par exemple,
qu'au moment où la promesse,

138
00:07:59,410 --> 00:08:01,990
l'option peut être relevée,
les actions et les parts sociales

139
00:08:02,190 --> 00:08:04,540
valent seulement 80 euros,
cela peut embêter l'acquéreur de

140
00:08:04,740 --> 00:08:06,970
devoir acheter à 100 euros ce qui
ne vaut plus que 80 euros.

141
00:08:07,170 --> 00:08:08,380
Donc, il va chercher à se désengager.

142
00:08:09,430 --> 00:08:17,020
L'argument a porté sur la conformité
de ces clauses prévues dans des

143
00:08:17,220 --> 00:08:20,950
actes de promesse de cession à
la prohibition des clauses léonines

144
00:08:21,150 --> 00:08:22,660
prévues par l'article 1844-1.

145
00:08:22,860 --> 00:08:25,330
Alors, le raisonnement qui a été tenu,
c'était de dire : regardez,

146
00:08:28,240 --> 00:08:31,960
je me suis engagé à racheter des
parts sociales ou des actions à

147
00:08:32,160 --> 00:08:32,920
100 euros.

148
00:08:33,120 --> 00:08:34,720
Or, du coup, cela veut dire quoi ?

149
00:08:34,920 --> 00:08:37,420
Cela veut dire que si la valeur
de ces parts sociales ou de ces

150
00:08:37,620 --> 00:08:40,000
actions a diminué - dans mon exemple,
elles sont passées de 100 à 80

151
00:08:40,200 --> 00:08:42,310
- je vais quand même être obligé
de les acheter à 100 euros.

152
00:08:42,510 --> 00:08:46,240
Donc, en fait, celui qui était
resté associé pendant un certain temps,

153
00:08:46,630 --> 00:08:48,400
il va éviter cette plus-value.

154
00:08:49,060 --> 00:08:52,390
Je vais lui garantir le fait qu'il
n'ait pas à supporter cette plus value.

155
00:08:52,590 --> 00:08:55,390
Ces actions qu'il détenait sont
passées de 100 à 80 euros.

156
00:08:55,590 --> 00:08:57,760
Pourtant, moi, je vais être obligé
de lui acheter 100 euros.

157
00:08:57,960 --> 00:08:59,650
Donc, pendant tout le temps où
il est resté associé,

158
00:08:59,860 --> 00:09:01,370
il était sûr de ne pas pouvoir perdre.

159
00:09:01,570 --> 00:09:02,380
Il n'allait pas perdre d'argent.

160
00:09:02,590 --> 00:09:06,580
Il était sûr de pouvoir revendre
ses actions au minimum à 100 euros.

161
00:09:06,780 --> 00:09:09,370
Donc, il était exonéré de toute
contribution aux pertes.

162
00:09:09,570 --> 00:09:14,320
Donc, c'est une contravention à
l'article 1844-1 du Code civil

163
00:09:14,520 --> 00:09:19,810
qui interdit d'exonérer un associé
de toute contribution aux pertes.

164
00:09:20,010 --> 00:09:22,440
Alors, cette affaire a donné lieu
à un arrêt très célèbre,

165
00:09:22,640 --> 00:09:27,340
un arrêt Bowater du 20 mai 1986,
dans lequel la Cour de cassation

166
00:09:27,540 --> 00:09:32,230
a rejeté cette argumentation fondée
sur l'article 1844-1 du Code civil.

167
00:09:32,640 --> 00:09:36,670
Elle a considéré que l'objet d'une
telle convention, la promesse de

168
00:09:36,870 --> 00:09:40,600
rachat était la transmission de
droits sociaux.

169
00:09:41,290 --> 00:09:45,190
L'objet de la convention n'était
pas du tout d'exonérer l'associé

170
00:09:45,390 --> 00:09:48,520
qui était resté dans la société
de contribution aux pertes.

171
00:09:48,720 --> 00:09:53,350
C'était d'organiser un équilibre
entre les prestations de chacune

172
00:09:53,550 --> 00:09:55,720
des parties dans le cadre de cette
cession de droits sociaux.

173
00:09:55,920 --> 00:09:58,000
Donc, la Cour de cassation,
elle s'en tient à un critère de

174
00:09:58,200 --> 00:09:59,620
l'objet, peu importe les effets.

175
00:09:59,890 --> 00:10:02,590
Elle ne se pose même pas la question
de savoir si, dans les faits,

176
00:10:02,790 --> 00:10:05,370
les conséquences de cet engagement
étaient qu'il ne contribuait pas

177
00:10:06,970 --> 00:10:07,730
aux pertes.

178
00:10:07,930 --> 00:10:10,630
En réalité, la Cour de cassation
se focalise sur le critère de l'objet

179
00:10:10,830 --> 00:10:13,360
en disant : regardez,
l'objet n'était pas d'exonérer

180
00:10:13,560 --> 00:10:15,610
toute contribution aux pertes,
c'était de réaliser,

181
00:10:15,810 --> 00:10:18,970
d'organiser la cession de ses droits
sociaux.

182
00:10:19,170 --> 00:10:21,790
C'est comme ça qu'elle arrive à
valider l'opération au regard de

183
00:10:21,990 --> 00:10:24,520
l'article 1844-1 du Code civil.

184
00:10:24,970 --> 00:10:28,240
Autre hypothèse où la question
s'est posée, celle des conventions

185
00:10:28,440 --> 00:10:29,200
de portage.

186
00:10:29,400 --> 00:10:30,720
Alors, que sont les conventions
de portage ?

187
00:10:31,120 --> 00:10:33,910
La convention de portage - je peux
vous en donner une définition assez

188
00:10:34,110 --> 00:10:37,780
commune en doctrine - c'est la
convention par laquelle un porteur

189
00:10:37,980 --> 00:10:41,260
accepte, sur demande du donneur
d'ordre - une autre personne,

190
00:10:41,460 --> 00:10:44,740
donc c'est elle qui donne l'ordre
- de se rendre actionnaire ou associé

191
00:10:44,950 --> 00:10:48,970
par acquisition ou souscription
de droits sociaux, étant expressément

192
00:10:49,170 --> 00:10:52,690
convenu qu'après un certain délai,
ces droits sociaux seront transférés

193
00:10:52,890 --> 00:10:55,510
à une personne désignée dans la
Convention, cette personne étant

194
00:10:56,230 --> 00:10:59,830
le bénéficiaire qui peut être aussi
le donneur d'ordre.

195
00:11:01,970 --> 00:11:07,000
Cette transmission des actions
se fait à un prix fixé dès l'origine.

196
00:11:07,200 --> 00:11:08,770
Qu'est-ce que cela veut dire
concrètement ?

197
00:11:09,010 --> 00:11:12,160
En fait, vous avez besoin d'un
associé supplémentaire.

198
00:11:12,560 --> 00:11:17,180
Vous faites appel à un tiers qui
accepte de devenir associé pendant

199
00:11:17,380 --> 00:11:22,400
un certain temps, mais il est convenu
qu'après expiration d'un certain temps,

200
00:11:22,600 --> 00:11:26,510
cet associé va être sûr de pouvoir
sortir de la société parce que

201
00:11:26,710 --> 00:11:29,780
vous vous êtes engagé,
vous avez promis de lui racheter

202
00:11:30,020 --> 00:11:32,440
les actions ou les parts sociales
qu'il avait achetées et puis,

203
00:11:32,640 --> 00:11:35,210
même généralement, il y a ce qu'on
appelle des promesses croisées,

204
00:11:35,410 --> 00:11:39,170
c'est-à-dire que lui-même s'est
engagé à vous revendre des actions.

205
00:11:39,370 --> 00:11:42,700
Donc, vraiment, cela montre qu'il
n'y a pas une intention qu'il reste

206
00:11:42,900 --> 00:11:43,660
associé.

207
00:11:43,860 --> 00:11:46,370
En fait, il devient associé pour
un temps donné.

208
00:11:46,570 --> 00:11:51,860
Mais après, l'idée, c'est qu'il
ressorte de la société sans avoir

209
00:11:52,060 --> 00:11:54,620
de conséquences négatives,
c'est-à-dire sans perdre d'argent.

210
00:11:54,820 --> 00:11:58,430
C'est-à-dire qu'on lui fixe un
prix fixé dès l'origine de rachat.

211
00:11:58,630 --> 00:12:01,520
Donc, il sait à combien il va pouvoir
vous revendre les actions qu'il

212
00:12:01,720 --> 00:12:04,040
a acceptées d'acquérir ou de souscrire.

213
00:12:04,310 --> 00:12:06,930
Quand il y a une augmentation de
capital, on parle de souscription,

214
00:12:07,130 --> 00:12:08,690
alors que quand on les a achetées,
on parle d'acquisition,

215
00:12:08,890 --> 00:12:09,770
d'où la différence d'expression.

216
00:12:09,970 --> 00:12:13,160
Donc, ces actions qu'il a acceptées
ou ces parts sociales qu'il a acceptées

217
00:12:13,360 --> 00:12:15,830
de souscrire ou d'acheter,
il est sûr de pouvoir les revendre

218
00:12:16,040 --> 00:12:17,600
à un prix fixé dès l'origine.

219
00:12:17,800 --> 00:12:21,140
Généralement, ce prix fixé dès
l'origine, c'est le prix auquel

220
00:12:21,340 --> 00:12:25,130
il a acheté les actions plus un
intérêt, un certain pourcentage

221
00:12:25,330 --> 00:12:28,190
par an pour le service rendu,
parce qu'il a accepté de devenir

222
00:12:28,390 --> 00:12:29,810
actionnaire sur votre demande.

223
00:12:30,010 --> 00:12:33,440
Alors,  dans ce cas-là,
est-ce que c'est contraire à la

224
00:12:33,640 --> 00:12:34,580
prohibition des clauses léonines ?

225
00:12:35,440 --> 00:12:38,390
On peut avoir tendance à dire oui,
puisque là encore, il ne contribue

226
00:12:38,590 --> 00:12:39,350
pas aux pertes.

227
00:12:39,550 --> 00:12:43,460
Il est sûr d'avoir une certaine
somme qui va lui être payée et

228
00:12:43,660 --> 00:12:47,060
ce sera au minimum, ce qu'il a
lui-même investi, donc,

229
00:12:47,260 --> 00:12:48,170
il ne veut pas perdre d'argent.

230
00:12:48,370 --> 00:12:54,050
Donc, on pourrait avoir l'impression
que c'est une atteinte à la prohibition

231
00:12:54,250 --> 00:12:55,010
des clauses léonines.

232
00:12:55,210 --> 00:12:56,480
Eh bien, la Cour de cassation,
à plusieurs reprises,

233
00:12:56,750 --> 00:12:58,280
a validé tout de même ce montage.

234
00:12:59,030 --> 00:13:01,370
Elle l'a fait dans un arrêt du
24 mai 1994.

235
00:13:01,640 --> 00:13:05,220
Elle l'a fait aussi dans un autre
arrêt, un arrêt du 22 février 2005

236
00:13:05,420 --> 00:13:07,430
que je vais appeler l'arrêt L,
parce qu'on va voir qu'il y a un

237
00:13:07,630 --> 00:13:10,970
arrêt de la même date qui s'appelle
un arrêt Z, qui est aussi relatif

238
00:13:11,170 --> 00:13:12,110
à la prohibition des clauses léonines.

239
00:13:12,310 --> 00:13:14,450
Donc, pour ne pas les confondre,
on leur donne une lettre chacun

240
00:13:14,750 --> 00:13:18,830
et celui dont je vous parle,
c'est l'arrêt L du 22 février 2005.

241
00:13:20,000 --> 00:13:23,120
Donc, dans cette hypothèse-là,
la Cour de cassation,

242
00:13:24,560 --> 00:13:27,710
cette convention de portage qui
se matérialisait par des promesses

243
00:13:27,950 --> 00:13:33,020
croisées de rachats et de ventes
montrait que les parties avaient

244
00:13:33,220 --> 00:13:36,640
organisé une rétrocession des actions
- en l'espèce, c'était des actions

245
00:13:36,840 --> 00:13:46,040
- des actions litigieuses et c'était
sans incidence sur la contribution

246
00:13:46,240 --> 00:13:48,620
aux pertes et la participation
aux bénéfices.

247
00:13:48,820 --> 00:13:50,960
Donc, là encore, on a l'impression
que la Cour de cassation,

248
00:13:51,770 --> 00:13:54,080
elle a recours à ce critère de l'objet.

249
00:13:54,280 --> 00:13:56,300
Elle dit que là, l'objectif,
c'est d'organiser une rétrocession

250
00:13:56,500 --> 00:13:59,060
des parts sociales et de réaliser
une opération économique que la

251
00:13:59,260 --> 00:14:02,180
Cour de cassation estime une opération
opportune.

252
00:14:02,380 --> 00:14:04,940
Donc, elle met à l'écart l'article
1844-1.

253
00:14:05,140 --> 00:14:06,920
Enfin, elle ne le met pas vraiment
à l'écart, puisqu'elle considère

254
00:14:07,120 --> 00:14:10,910
qu'il pourrait s'appliquer,
mais que parce que c'est juste

255
00:14:11,110 --> 00:14:14,900
une organisation, une rétrocession,
les conditions d'application de

256
00:14:15,100 --> 00:14:17,840
cette prohibition des clauses léonines
n'étaient pas remplies en l'espèce.

257
00:14:18,200 --> 00:14:21,770
Dernière hypothèse concrète où
la question de la prohibition des

258
00:14:21,970 --> 00:14:24,300
clauses léonines s'est posée,
c'est l'hypothèse des promesses

259
00:14:24,500 --> 00:14:27,560
cette fois-ci unilatérales de rachat
à prix plancher.

260
00:14:27,760 --> 00:14:31,280
Donc, là, c'est un peu comme dans
l'hypothèse de la cession échelonnée

261
00:14:31,480 --> 00:14:32,240
dans le temps.

262
00:14:32,440 --> 00:14:33,400
Il n'y a pas de promesses croisées.

263
00:14:33,600 --> 00:14:39,710
Il y a juste une personne qui s'engage
à racheter les actions qu'un tiers

264
00:14:39,910 --> 00:14:41,900
a accepté d'acheter ou de souscrire.

265
00:14:42,100 --> 00:14:45,470
Donc, là, ces promesses de rachat
à prix plancher Interviennent souvent

266
00:14:45,670 --> 00:14:47,720
dans les opérations qu'on appelle
des opérations de capital

267
00:14:47,920 --> 00:14:48,680
investissement.

268
00:14:48,880 --> 00:14:52,190
Le capital investissement,
ce sont les investissements dans

269
00:14:52,390 --> 00:14:56,770
les sociétés qui sont réalisés
par des professionnels pour financer

270
00:14:57,010 --> 00:14:57,800
des sociétés.

271
00:14:58,000 --> 00:15:00,370
Cela peut être souvent des sociétés
qui sont en pleine période de

272
00:15:00,570 --> 00:15:02,920
croissance ou alors qui sont des
sociétés nouvellement créées,

273
00:15:03,120 --> 00:15:03,880
des start-up.

274
00:15:04,080 --> 00:15:06,870
Donc là, vous avez du capital
investissement qui intervient dans

275
00:15:07,070 --> 00:15:10,490
ces sociétés et les professionnels
qui investissent, qui réalisent

276
00:15:10,690 --> 00:15:11,650
ces opérations de capital
investissement, généralement,

277
00:15:12,040 --> 00:15:12,990
ils ne veulent pas perdre d'argent.

278
00:15:13,190 --> 00:15:15,070
Donc, ils acceptent de financer,
mais ils veulent une garantie.

279
00:15:15,270 --> 00:15:17,440
Mais, cette garantie,
elle prend la forme d'une promesse

280
00:15:17,640 --> 00:15:18,400
de rachat.

281
00:15:18,600 --> 00:15:20,410
Les autres associés,
les fondateurs de la société

282
00:15:20,610 --> 00:15:24,040
généralement, acceptent de s'engager
à racheter les actions ou les parts

283
00:15:24,240 --> 00:15:29,590
sociales auxquelles la société
de capital investissement a accepté

284
00:15:29,790 --> 00:15:32,590
de souscrire ou qu'elle a accepté
d'acheter à un prix plancher,

285
00:15:32,790 --> 00:15:37,120
donc un prix minimum,
comme ça, celui qui a investi,

286
00:15:37,330 --> 00:15:39,910
le professionnel qui a investi,
l'investisseur professionnel est

287
00:15:41,650 --> 00:15:43,000
sûr de ne rien perdre.

288
00:15:43,200 --> 00:15:45,700
Est-ce que c'est valable là encore,
cette opération ?

289
00:15:45,940 --> 00:15:47,070
Pour la Cour de cassation,
oui.

290
00:15:47,440 --> 00:15:50,470
Elle l'a affirmé à plusieurs reprises,
et notamment, dans un arrêt du

291
00:15:50,670 --> 00:15:51,850
16 novembre 2004.

292
00:15:52,090 --> 00:15:56,200
Dans un arrêt du 16 novembre 2004,
la Cour de cassation a validé ce

293
00:15:56,400 --> 00:16:00,180
type de promesse, ce type de clause
parce que pour la Cour de cassation,

294
00:16:00,380 --> 00:16:03,790
l'objet de la convention - là encore,
on retrouve une référence à l'objet

295
00:16:03,990 --> 00:16:07,150
de la convention - c'est d'assurer
l'équilibre des conventions conclues

296
00:16:07,350 --> 00:16:10,870
entre les parties, qui assurait
le remboursement de l'investissement

297
00:16:12,100 --> 00:16:16,150
au professionnel, investissement
auquel il n'aurait pas consenti

298
00:16:16,350 --> 00:16:18,640
en l'absence de ces clauses
particulières.

299
00:16:18,840 --> 00:16:24,160
Donc, la clause n'avait que pour
objet d'organiser la transmission

300
00:16:24,360 --> 00:16:28,630
des droits sociaux et non pas de
garantir à un associé contre toute

301
00:16:28,830 --> 00:16:30,100
contribution aux pertes.

302
00:16:30,910 --> 00:16:35,500
La Cour de cassation rajoute d'ailleurs
qu'en l'espèce, le bénéficiaire

303
00:16:35,700 --> 00:16:40,450
de la promesse était avant tout
un bailleur de fonds et donc un

304
00:16:40,650 --> 00:16:41,410
investisseur.

305
00:16:41,610 --> 00:16:44,080
Alors, là, la loterie n'a pas su
quoi faire de cette référence à

306
00:16:44,280 --> 00:16:45,160
l'investisseur.

307
00:16:45,970 --> 00:16:47,620
C'était un professionnel de
l'investissement, certes.

308
00:16:47,820 --> 00:16:53,950
Donc, du coup, est-ce que ça justifiait
qu'il soit exonéré de toute ou

309
00:16:54,490 --> 00:16:58,390
est-ce que cela justifiait qu'on
écarte l'application à son détriment

310
00:16:58,590 --> 00:16:59,650
de la prohibition des clauses
léonines ?

311
00:16:59,850 --> 00:17:03,070
Est-ce qu'il y aurait des associés,
puis d'autres personnes qui ne

312
00:17:03,270 --> 00:17:04,730
seraient pas des associés,
mais qui quand même,

313
00:17:04,930 --> 00:17:06,880
auraient les mêmes droits qu'un
associé, qui seraient des investisseurs

314
00:17:07,080 --> 00:17:08,950
et auxquelles on n'appliquerait
pas la prohibition des clauses

315
00:17:09,150 --> 00:17:09,910
léonines ?

316
00:17:10,110 --> 00:17:15,010
Bref, là-dessus, cela a donné lieu
à beaucoup de discussions et on

317
00:17:15,210 --> 00:17:16,780
a vu naître par ailleurs,
dans la jurisprudence,

318
00:17:16,980 --> 00:17:20,980
un autre critère dans un autre
arrêt du 22 février 2005,

319
00:17:21,180 --> 00:17:23,850
dont je vous parlais tout à l'heure,
cette fois-ci, un arrêt Z qu'on

320
00:17:24,050 --> 00:17:25,570
a appelé le critère de la fenêtre.

321
00:17:25,960 --> 00:17:31,540
Une clause, une promesse de rachat
à prix plancher semble également

322
00:17:31,740 --> 00:17:36,640
valable lorsque l'option pour se
faire racheter les actions est

323
00:17:36,840 --> 00:17:37,600
encadrée dans une fenêtre.

324
00:17:37,800 --> 00:17:39,760
C'est-à-dire que vous ne pouvez
pas demander le remboursement tout

325
00:17:39,960 --> 00:17:42,040
de suite et vous ne pouvez pas
demander de rachat tout de suite.

326
00:17:42,240 --> 00:17:44,440
Vous devez attendre un certain délai,
puis après, vous avez un délai

327
00:17:44,640 --> 00:17:46,810
pendant lequel vous pouvez demander
le rachat.

328
00:17:47,010 --> 00:17:49,180
Puis, après ce délai s'arrête et là,
vous ne pourrez plus demander le

329
00:17:49,380 --> 00:17:50,140
rachat.

330
00:17:50,340 --> 00:17:51,700
Donc, il y a juste une fenêtre
de tir pendant laquelle vous pouvez

331
00:17:51,900 --> 00:17:52,660
lever l'option.

332
00:17:52,860 --> 00:17:55,330
La Cour de cassation,
dans cet arrêt du 22 février 2005,

333
00:17:55,600 --> 00:17:58,690
elle semble considérer que dans
un tel cas, quand il y a une telle

334
00:17:58,890 --> 00:18:04,660
fenêtre, eh bien, vous ne rentrez

335
00:18:04,860 --> 00:18:09,010
pas dans le domaine de la prohibition
des clauses léonines et par conséquent,

336
00:18:09,220 --> 00:18:10,690
la convention est valable.

337
00:18:10,890 --> 00:18:13,690
Donc, a priori, de cette jurisprudence
un petit peu complexe tout de même,

338
00:18:13,890 --> 00:18:17,860
avouons-le, il semble qu'on peut
déduire que les promesses de rachat

339
00:18:18,060 --> 00:18:20,050
à prix plancher sont valables,
soit si vous êtes un investisseur

340
00:18:20,250 --> 00:18:23,170
professionnel, soit alors parce
qu'il y a une fenêtre qui existe

341
00:18:23,370 --> 00:18:25,510
et que vous ne pouvez lever l'option
que pendant cette fenêtre,

342
00:18:25,710 --> 00:18:27,370
alors après on peut se poser la
question est-ce que c'est vraiment

343
00:18:27,570 --> 00:18:30,640
justifié de dire parce qu'il y
a une fenêtre, c'est valable au

344
00:18:30,840 --> 00:18:34,600
regard de la prohibition des clauses
léonines.

345
00:18:34,800 --> 00:18:37,360
On peut se dire qu'il est vrai
qu'avant la levée de l'option,

346
00:18:37,560 --> 00:18:40,540
il y a peut-être un risque de devoir
contribuer aux pertes par le biais

347
00:18:40,740 --> 00:18:43,150
d'une réduction de capital social
motivée par des pertes dont je

348
00:18:43,350 --> 00:18:45,940
vous ai parlées tout à l'heure
ou la semaine dernière - je ne

349
00:18:46,140 --> 00:18:46,900
me rappelle plus.

350
00:18:47,100 --> 00:18:49,180
Bref, donc, là, il pourrait y avoir
un risque.

351
00:18:49,380 --> 00:18:53,950
Vous risqueriez de perdre des actions
pour contribuer à ces pertes dans

352
00:18:54,150 --> 00:18:56,800
le cadre d'une réduction de capital
social motivée par des pertes.

353
00:18:57,000 --> 00:18:58,990
Puis, c'est vrai qu'après,
si vous ne levez pas l'option pendant

354
00:18:59,190 --> 00:19:01,540
la durée de la fenêtre,
vous devenez un actionnaire à part

355
00:19:01,740 --> 00:19:03,310
entière et là, vous n'avez plus
de promesse de rachat.

356
00:19:03,510 --> 00:19:05,530
Donc, s'il y a des pertes,
vous allez devoir contribuer à

357
00:19:05,730 --> 00:19:06,490
ces pertes.

358
00:19:06,690 --> 00:19:08,010
En fait, finalement,
la durée pendant laquelle vous

359
00:19:08,210 --> 00:19:11,770
êtes protégé contre ces pertes
est une durée limitée,

360
00:19:12,340 --> 00:19:16,990
ce qui pourrait justifier l'exonération
au regard de la prohibition des

361
00:19:17,190 --> 00:19:17,980
clauses léonines.

362
00:19:18,180 --> 00:19:23,440
Alors, un auteur, Monsieur
Pietrancosta, dans un article à

363
00:19:23,640 --> 00:19:28,540
la RJDA 2006 n°1, page 67 dit que
tout cela est bien compliqué et

364
00:19:28,740 --> 00:19:31,240
qu'on pourrait peut-être en rester
aux critères de l'objet et de dire

365
00:19:31,440 --> 00:19:34,120
que de toute façon, là,
ce qu'on organise, ce sont des

366
00:19:34,320 --> 00:19:37,690
cessions, des rétrocessions,
des promesses de cession,

367
00:19:37,890 --> 00:19:38,650
etc.

368
00:19:38,850 --> 00:19:41,350
On n'est pas dans le cadre du contrat
de société lui-même.

369
00:19:41,650 --> 00:19:44,590
On n'est pas dans le domaine
d'application de l'article 1844-1

370
00:19:44,950 --> 00:19:45,710
du Code civil.

371
00:19:45,910 --> 00:19:48,130
On devrait éviter des raisonnements
trop compliqués juste pour se dire

372
00:19:48,430 --> 00:19:52,030
voilà, on est dans le cadre d'une
cession de droits sociaux.

373
00:19:52,230 --> 00:19:54,850
L'article 1844-1 du Code civil
ne devrait pas s'appliquer.

374
00:19:55,050 --> 00:19:57,400
Puis, il y a peut-être un vice
du raisonnement dans ce que fait

375
00:19:57,600 --> 00:19:58,930
la Cour de cassation de façon générale.

376
00:19:59,270 --> 00:20:02,110
C'est le point de départ de son
raisonnement.

377
00:20:02,710 --> 00:20:07,810
Elle considère que l'article 1844-1
du moins, en théorie,

378
00:20:08,010 --> 00:20:08,770
devrait s'appliquer.

379
00:20:08,970 --> 00:20:10,720
Sur le point de départ,
c'est qu'elle semble assimiler

380
00:20:10,960 --> 00:20:14,660
une absence de moins-value,
quand vous cédez des droits sociaux,

381
00:20:14,860 --> 00:20:16,960
vous évitez une moins-value parce
que vous avez un prix plancher donc,

382
00:20:17,160 --> 00:20:18,610
vous êtes sûr de ne pas perdre
d'argent de ce point de vue là,

383
00:20:18,880 --> 00:20:20,110
à une contribution aux pertes.

384
00:20:20,310 --> 00:20:22,900
Est-ce que vraiment,
c'est logique d'assimiler les deux ?

385
00:20:23,100 --> 00:20:27,190
Parce qu'on peut tout à fait dire
que la moins-value dans une cession

386
00:20:27,390 --> 00:20:31,300
de droits sociaux, ce n'est pas
forcément corrélé à l'existence

387
00:20:31,500 --> 00:20:32,340
de pertes dans la société.

388
00:20:32,540 --> 00:20:33,730
Une société peut réaliser des pertes.

389
00:20:33,970 --> 00:20:36,700
Pour autant, si les perspectives
sont bonnes par la suite,

390
00:20:37,270 --> 00:20:39,370
vos titres, vos actions,
vos droits sociaux ne perdront

391
00:20:39,570 --> 00:20:40,330
pas d'argent.

392
00:20:40,530 --> 00:20:43,300
Ou, à l'inverse, une société peut
ne pas avoir constaté de perte,

393
00:20:43,500 --> 00:20:46,030
mais les perspectives sont mauvaises
et du coup, vos droits sociaux

394
00:20:46,230 --> 00:20:49,300
perdent de l'argent alors même
qu'il n'y a pas de perte.

395
00:20:49,500 --> 00:20:54,610
Donc, partir du postulat de départ
comme le fait la Cour de cassation,

396
00:20:54,810 --> 00:20:57,070
puisqu'elle se pose la question
de l'applicabilité de l'article

397
00:20:57,270 --> 00:21:01,990
1844-1 du Code civil à ces
situations-là qu'une moins-value

398
00:21:02,440 --> 00:21:05,080
pour des cessions d'actions,
cela peut-être l'équivalent d'une

399
00:21:05,280 --> 00:21:07,390
contribution aux pertes,
c'est déjà un postulat qui est

400
00:21:07,590 --> 00:21:08,890
quelque peu discutable.

401
00:21:09,090 --> 00:21:11,650
On pourrait tout à fait dire que là,
en fait, on est totalement en dehors

402
00:21:11,890 --> 00:21:15,370
du domaine d'application des clauses
léonines, ce qui validerait ces

403
00:21:15,570 --> 00:21:18,490
montages qui sont considérés
économiquement comme plutôt opportuns

404
00:21:18,850 --> 00:21:20,770
et cela éviterait d'avoir cette
jurisprudence.

405
00:21:20,970 --> 00:21:22,480
Alors, il faut quand même bien
voir que la leçon semble avoir

406
00:21:22,680 --> 00:21:25,360
été comprise parce que cela fait
très longtemps qu'on n'a plus d'arrêt

407
00:21:25,570 --> 00:21:26,410
sur la question.

408
00:21:26,950 --> 00:21:29,230
Vous voyez les derniers arrêts
que je vous cite, c'est l'arrêt de 2005.

409
00:21:29,430 --> 00:21:33,070
On a un arrêt de 2009 qui reprend
aussi la solution du 16 novembre 2004.

410
00:21:33,270 --> 00:21:36,760
Mais bref, cela reste quelque chose
d'assez stabilisé a priori maintenant.

411
00:21:36,960 --> 00:21:40,120
Donc, il n'y a plus tellement de
discussions sur ce point.

412
00:21:40,320 --> 00:21:43,750
Mais, la Cour de cassation aurait
quand même pu simplifier quelque

413
00:21:43,950 --> 00:21:44,710
peu son raisonnement. 

414
00:21:44,910 --> 00:21:47,020
J'en arrive maintenant dans une
section 4, au dernier élément

415
00:21:47,220 --> 00:21:50,230
caractéristique de l'acte juridique
à l'origine de la société,

416
00:21:50,430 --> 00:21:52,120
qui, la plupart du temps,
est un contrat de société.

417
00:21:52,480 --> 00:21:55,660
Ce dernier élément caractéristique,
c'est l'affectio societatis.

418
00:21:55,900 --> 00:22:00,730
Alors, l'affectio societatis,
cela signifie quoi ?

419
00:22:00,930 --> 00:22:07,240
Il y a une définition traditionnelle
qui n'est pas sans rappeler les

420
00:22:07,440 --> 00:22:09,790
termes employés à l'article 1832
du Code civil.

421
00:22:10,450 --> 00:22:12,300
En effet, l'affectio societatis,
traditionnellement,

422
00:22:13,150 --> 00:22:17,590
il est défini comme la volonté
des associés de collaborer ensemble

423
00:22:17,790 --> 00:22:22,690
sur un pied d'égalité au succès
d'une entreprise commune.

424
00:22:24,190 --> 00:22:26,530
C'est une définition qui est un
peu passée de mode.

425
00:22:26,730 --> 00:22:30,430
Aujourd'hui, on la remplace plus
volontiers par une assimilation

426
00:22:30,630 --> 00:22:35,020
de cet affectio societatis à l'exigence
d'un véritable consentement à devenir

427
00:22:35,220 --> 00:22:38,140
associé et donc, pas seulement
à être un associé de paille.

428
00:22:38,340 --> 00:22:40,990
On peut seulement être un associé
fictif, mais à vouloir vraiment

429
00:22:41,190 --> 00:22:43,910
s'investir dans le fonctionnement
de la société.

430
00:22:44,110 --> 00:22:47,920
C'est ça l'exigence d'un affectio
societatis telle qu'elle est comprise

431
00:22:48,310 --> 00:22:49,070
aujourd'hui.

432
00:22:49,270 --> 00:22:53,860
Alors, l'affectio societatis joue
un rôle dans un certain nombre

433
00:22:54,460 --> 00:22:58,570
d'hypothèses, notamment,
premier rôle que peut jouer l'affectio

434
00:22:58,770 --> 00:23:02,590
societatis, c'est que cela sert
à démontrer l'existence de ce qu'on

435
00:23:02,790 --> 00:23:05,180
appelle une société créée de fait
- dont je vous ai déjà parlée un

436
00:23:05,380 --> 00:23:09,910
petit peu - qui est une société
où les les associés n'ont pas eu

437
00:23:10,110 --> 00:23:12,940
conscience d'agir comme des associés
dans une société.

438
00:23:13,760 --> 00:23:17,830
Eh bien, si finalement ils ont
tout fait comme si c'était une société,

439
00:23:18,030 --> 00:23:20,260
donc comme on arrive à démontrer
quand même que sans en avoir

440
00:23:20,460 --> 00:23:23,860
conscience, ils ont eu un affectio
societatis, on arrivera à démontrer

441
00:23:24,060 --> 00:23:24,880
l'existence d'une société.   

442
00:23:25,080 --> 00:23:28,270
L'affectio societatis,
cela sert aussi à distinguer le

443
00:23:28,470 --> 00:23:29,800
contrat de société d'autres contrats.

444
00:23:30,190 --> 00:23:34,000
Par exemple, vous avez des prêts
qui peuvent être des prêts avec

445
00:23:34,200 --> 00:23:37,870
intéressement aux résultats,   
donc, avec un intérêt qui va varier

446
00:23:38,070 --> 00:23:39,220
en fonction des résultats de la
société.

447
00:23:39,670 --> 00:23:45,730
On n'est pas loin tout de même
de la situation d'un associé qui

448
00:23:45,930 --> 00:23:47,950
reçoit des bénéfices en fonction
des résultats de la société.

449
00:23:48,150 --> 00:23:54,190
Donc, pour distinguer un tel prêt
d'un apport, donc de la qualité

450
00:23:54,390 --> 00:23:55,600
d'associé, on a recours à l'aflectio
societatis.

451
00:23:55,800 --> 00:23:58,870
Est-ce que c'est le banquier qui
a prêté s'est immiscé dans la gestion

452
00:23:59,070 --> 00:23:59,830
de la société ou pas ?

453
00:24:00,030 --> 00:24:01,290
S'il s'est immiscé dans la gestion
de la société, en fait,

454
00:24:01,510 --> 00:24:03,910
il avait un affectio societatis,
c'était un associé et peut-être

455
00:24:04,110 --> 00:24:06,130
que cela va le desservir parce
que si cela se trouve que la société

456
00:24:06,330 --> 00:24:10,840
est une société à risque illimité
et le banquier en question va être

457
00:24:11,040 --> 00:24:14,320
tenu des dettes de la société,
ce qu'il va chercher absolument

458
00:24:14,520 --> 00:24:15,280
à éviter.

459
00:24:15,480 --> 00:24:17,790
Cela peut aussi servir en cas d'apport
en industrie, l'affectio societatis,

460
00:24:18,670 --> 00:24:21,370
à voir si c'est vraiment un apport
en industrie et pas,

461
00:24:21,570 --> 00:24:24,340
par exemple, un contrat de travail
déguisé.

462
00:24:24,540 --> 00:24:27,100
Donc, si vous n'avez pas l’affectio
societatis, si en plus,

463
00:24:27,300 --> 00:24:29,440
il y a un lien de subordination,
cela pourrait être en réalité un

464
00:24:29,640 --> 00:24:30,400
contrat de travail. 

465
00:24:31,840 --> 00:24:34,870
L'affectio societatis,
du moins son absence,

466
00:24:35,080 --> 00:24:37,880
va servir à annuler des sociétés
pour fictivité.

467
00:24:38,080 --> 00:24:41,500
On verra que des sociétés peuvent
être considérées comme étant fictives.

468
00:24:41,710 --> 00:24:43,900
C'est le cas, s'il n'y a pas d'affectio
societatis, dans ce cas là,

469
00:24:44,100 --> 00:24:44,860
elles seront nulles.

470
00:24:45,070 --> 00:24:48,970
Plus récemment, dans un arrêt du
9 juin 2009, la Cour de cassation

471
00:24:49,170 --> 00:24:53,320
a sous-entendu que le contrat de
souscription, c'est-à-dire le contrat

472
00:24:53,520 --> 00:24:56,920
par lequel une personne montre
qu'elle souhaite souscrire à des

473
00:24:57,120 --> 00:24:58,810
actions ou des parts sociales dans
le cadre d'une augmentation de

474
00:24:59,010 --> 00:24:59,770
capital social.

475
00:24:59,970 --> 00:25:04,830
Le contrat de souscription peut
être annulé pour défaut d'affectio

476
00:25:05,030 --> 00:25:05,790
societatis.

477
00:25:05,990 --> 00:25:08,860
En fait, on va regarder s'il y
a vraiment une volonté de faire

478
00:25:09,060 --> 00:25:09,910
partie de la société ou pas.

479
00:25:10,110 --> 00:25:14,920
Donc, s'il n'y a pas cette volonté-là,
le contrat de souscription pourra

480
00:25:15,120 --> 00:25:15,940
être annulé.

481
00:25:16,140 --> 00:25:22,570
Cela semble relativement logique
parce que la souscription à une

482
00:25:22,770 --> 00:25:25,600
augmentation de capital,
c'est un moyen de devenir partie

483
00:25:25,800 --> 00:25:28,300
au contrat de société et donc,
cela semble logique qu'on exige

484
00:25:28,500 --> 00:25:32,620
également de l'associé le même
affectio societatis que lorsque

485
00:25:32,820 --> 00:25:34,360
le contrat de société a été conclu.

486
00:25:34,560 --> 00:25:36,940
Donc, on l'exige au moment d'une
augmentation de capital social,

487
00:25:37,150 --> 00:25:40,780
tout comme on l'exige au moment
où il y a constitution de la société.

488
00:25:40,980 --> 00:25:45,700
Alors, en revanche, la Cour de
cassation, elle a refusé de contrôler

489
00:25:45,900 --> 00:25:49,750
la validité d'une cession cette
fois-ci de droits sociaux au regard

490
00:25:49,950 --> 00:25:50,710
de l'affectio societatis.

491
00:25:50,910 --> 00:25:54,310
Elle l'a refusé dans un arrêt de
la chambre commerciale du 11 juin

492
00:25:54,640 --> 00:25:55,400
2013. 

493
00:25:56,080 --> 00:25:59,560
De même, et ça, nous le verrons
un peu plus tard, quand nous étudierons

494
00:25:59,760 --> 00:26:02,260
les causes de dissolution d'une
société, la Cour de cassation a

495
00:26:02,460 --> 00:26:06,280
refusé que la disparition de l'affectio
societatis en cours de vie sociale

496
00:26:06,490 --> 00:26:09,420
soit une cause autonome de dissolution
de la société.

497
00:26:09,620 --> 00:26:12,340
On verra que cela ne suffit pas,
la disparition de l'affectio

498
00:26:12,540 --> 00:26:13,300
societatis.

499
00:26:13,500 --> 00:26:15,940
La disparition de la volonté d'être
ensemble au sein de la société,

500
00:26:16,140 --> 00:26:20,890
cela ne suffit pas à être une cause
de dissolution de la société.

501
00:26:21,090 --> 00:26:24,280
Donc, l'affectio societatis,
on le constate, est à côté de

502
00:26:24,480 --> 00:26:27,070
l'existence d'associés,
d'apport et de participation aux

503
00:26:27,270 --> 00:26:31,600
résultats, l'une des caractéristiques
de l'acte juridique à l'origine

504
00:26:31,800 --> 00:26:32,890
de la société.

505
00:26:33,090 --> 00:26:36,130
Mais, pour être valable,
cet acte juridique doit répondre

506
00:26:36,330 --> 00:26:39,430
à certaines conditions qu'il va
falloir exposer.

507
00:26:39,630 --> 00:26:42,220
Ce que nous ferons la semaine prochaine
dans un chapitre II.