1 00:00:05,550 --> 00:00:06,310 8. 2 00:00:07,020 --> 00:00:11,190 La précarité de l'autorisation d'occuper le domaine public. 3 00:00:13,750 --> 00:00:14,510 L'article L. 4 00:00:14,890 --> 00:00:22,000 2122-2 du CG3P est très clair, l'occupation ou l'utilisation du 5 00:00:22,200 --> 00:00:25,030 domaine public ne peut être que temporaire. 6 00:00:27,040 --> 00:00:31,960 Mais le principe est que l'acte prévoit le temps que durera le 7 00:00:32,160 --> 00:00:33,700 droit d'occupation. 8 00:00:34,030 --> 00:00:38,590 Sachant que si le titre prévoit une durée excessivement longue, 9 00:00:38,790 --> 00:00:42,220 alors cela contrevient aux exigences constitutionnelles. 10 00:00:42,420 --> 00:00:47,470 En effet, la possibilité de prolonger sans terme définitif une autorisation 11 00:00:47,670 --> 00:00:52,540 constitutive de droit réel porte une atteinte excessive à la protection 12 00:00:52,740 --> 00:00:54,190 due à la propriété publique. 13 00:00:54,400 --> 00:00:57,760 Et c'est ce qu'affirme le Conseil constitutionnel dans sa décision 14 00:00:57,960 --> 00:01:02,770 numéro 94-346 DC du 21 juillet 1994. 15 00:01:04,670 --> 00:01:10,630 Et cette limite temporelle est renforcée par le principe de précarité 16 00:01:10,840 --> 00:01:11,740 que je viens d'évoquer. 17 00:01:11,940 --> 00:01:13,810 En effet, l'article L. 18 00:01:14,010 --> 00:01:19,630 2122-3 du CG3P dispose que 19 00:01:20,260 --> 00:01:25,360 l'autorisation mentionnée à l'article 2122-1 présente un caractère précaire 20 00:01:25,750 --> 00:01:26,510 et révocable. 21 00:01:28,360 --> 00:01:34,030 La précarité est le corollaire du principe d'inaliénabilité. 22 00:01:34,960 --> 00:01:39,160 Par exemple, dans sa décision en date du 5 février 2009, 23 00:01:39,360 --> 00:01:44,050 Association Société centrale d'agriculture, le Conseil d'État 24 00:01:44,290 --> 00:01:49,690 a eu l'occasion d'affirmer que, je cite, "Le principe d'inaliénabilité 25 00:01:49,890 --> 00:01:53,200 du domaine public qui s'applique, sauf textes législatifs contraires, 26 00:01:53,830 --> 00:01:58,090 implique que l'autorité gestionnaire du domaine peut mettre fin à tout 27 00:01:58,290 --> 00:02:02,200 moment, sous réserve de justifier cette décision par un motif d'intérêt 28 00:02:02,400 --> 00:02:06,400 général, à l'autorisation d'occupation qu'elle a consentie". 29 00:02:08,290 --> 00:02:13,480 L'idée est simple : la personne publique propriétaire doit avoir 30 00:02:13,680 --> 00:02:17,830 la maîtrise sur l'affectation du bien, ce qui implique de pouvoir mettre 31 00:02:18,030 --> 00:02:22,000 fin à l'utilisation privative à tout moment, d'où le fait qu'elle 32 00:02:22,200 --> 00:02:24,430 peut en principe révoquer l'occupation. 33 00:02:24,630 --> 00:02:30,150 Concrètement, cette précarité entraîne 34 00:02:30,930 --> 00:02:31,980 plusieurs conséquences. 35 00:02:32,180 --> 00:02:37,560 D'abord, le propriétaire peut abroger 36 00:02:37,760 --> 00:02:41,790 l'acte unilatéral ou résilier la concession d'occupation. 37 00:02:41,990 --> 00:02:45,630 Donc, l'administration peut mettre fin à l'autorisation à tout moment. 38 00:02:45,830 --> 00:02:51,450 Souvent, vous pouvez lire que l'on parle de retrait de l'autorisation, 39 00:02:51,650 --> 00:02:54,480 mais c'est bien une abrogation en ce que la suppression de 40 00:02:54,680 --> 00:02:56,820 l'autorisation n'a pas d'effet rétroactif. 41 00:02:57,020 --> 00:03:02,430 Ensuite, le propriétaire public ne peut pas insérer des clauses 42 00:03:02,630 --> 00:03:05,760 qui interdisent la résiliation d'une concession d'occupation du 43 00:03:05,960 --> 00:03:11,250 domaine, comme l'affirme le Conseil d'État dans sa décision Eurolat de 1985. 44 00:03:11,450 --> 00:03:18,660 Enfin, au terme de l'autorisation, l'occupant n'a pas de droit au 45 00:03:18,860 --> 00:03:21,450 renouvellement de son autorisation. 46 00:03:22,170 --> 00:03:26,010 Il n'y a pas de droit au renouvellement, mais l'administration 47 00:03:26,210 --> 00:03:30,240 doit tout de même justifier le non-renouvellement par un motif 48 00:03:30,480 --> 00:03:31,290 d'intérêt général. 49 00:03:31,590 --> 00:03:35,550 Voyez ici la décision du Conseil d'État en 2017, Commune de 50 00:03:35,750 --> 00:03:38,730 Port-Vendres, dans laquelle le juge précise bien que le propriétaire, 51 00:03:38,930 --> 00:03:42,540 je cite, "peut décider, sous le contrôle du juge, 52 00:03:42,870 --> 00:03:45,810 de rejeter une demande de renouvellement pour un motif d'intérêt 53 00:03:46,010 --> 00:03:46,770 général". 54 00:03:48,060 --> 00:03:51,930 En outre, par principe, en cas de non-renouvellement, 55 00:03:52,440 --> 00:03:57,480 il n'y aura pas d'indemnisation, comme l'affirme le Conseil d'État 56 00:03:57,680 --> 00:03:59,820 dans sa décision du 20 juillet 1990, Duquesnoy. 57 00:04:02,940 --> 00:04:08,460 Ce principe de non-indemnisation est logique, précisément en raison 58 00:04:08,660 --> 00:04:09,630 de la précarité. 59 00:04:10,620 --> 00:04:15,150 S'il y avait une indemnisation à la fin normale de l'autorisation, 60 00:04:15,630 --> 00:04:18,330 alors il y aurait l'idée d'autorisations qui ont vocation 61 00:04:18,690 --> 00:04:21,750 à durer et à ne pas être temporellement limitées. 62 00:04:21,950 --> 00:04:23,100 Vous comprenez bien l'idée. 63 00:04:23,300 --> 00:04:28,170 Remarquez, et c'est important, que la précarité vaut tant pour 64 00:04:28,710 --> 00:04:32,730 l'occupant normal du domaine que pour l'occupant titulaire d'un 65 00:04:32,930 --> 00:04:33,690 droit réel. 66 00:04:33,890 --> 00:04:38,730 Or, cela remet fortement en cause la spécificité de sa situation. 67 00:04:39,210 --> 00:04:42,360 On peut même aller plus loin en affirmant qu'il est d'ailleurs 68 00:04:42,560 --> 00:04:46,110 même surprenant que l'on puisse continuer à parler, par exemple, 69 00:04:46,310 --> 00:04:48,030 de bail emphytéotique ou de droit réel. 70 00:04:48,480 --> 00:04:53,010 En effet, le droit réel implique la pérennité et s'oppose justement 71 00:04:53,370 --> 00:04:54,870 à la précarité. 72 00:04:55,070 --> 00:04:58,170 Voyez, en ce sens, l'arrêt de la troisième chambre civile de la 73 00:04:58,370 --> 00:05:03,390 Cour de cassation du 14 novembre 2002, Société Lactalis, qui affirme ceci 74 00:05:03,590 --> 00:05:06,690 à propos d'un jugement d'appel qui qualifiait un contrat de bail 75 00:05:06,890 --> 00:05:07,650 emphytéotique. 76 00:05:07,850 --> 00:05:10,200 "Qu'en statuant ainsi, alors qu'une clause de résolution 77 00:05:10,400 --> 00:05:13,950 de plein droit confère à la jouissance du preneur une précarité incompatible 78 00:05:14,190 --> 00:05:17,370 avec la constitution d'un droit réel, la Cour d'appel a violé les textes 79 00:05:17,610 --> 00:05:22,170 susvisés." Pour la Cour de cassation, une clause résolutoire de plein 80 00:05:22,370 --> 00:05:26,100 droit empêche la qualification de bail emphytéotique, mais pas 81 00:05:26,300 --> 00:05:30,060 en droit administratif, où l'on fait comme si cette précarité 82 00:05:30,260 --> 00:05:32,790 n'existait pas, même si elle est bien là. 83 00:05:34,740 --> 00:05:38,340 Cela fonctionne quand même, car finalement, cela ne ruine pas 84 00:05:38,540 --> 00:05:39,450 la confiance des prêteurs. 85 00:05:39,650 --> 00:05:40,410 Pourquoi ? 86 00:05:40,610 --> 00:05:43,740 Car ils savent que derrière, il y aura toujours la collectivité 87 00:05:43,940 --> 00:05:45,420 publique pour éponger d'éventuelles dettes. 88 00:05:47,020 --> 00:05:53,170 Cette précarité comporte néanmoins certaines garanties pour l'occupant, 89 00:05:54,070 --> 00:05:54,940 l'occupant évincé. 90 00:05:56,200 --> 00:05:59,290 Et ces garanties, on les compte en termes d'indemnisation, 91 00:05:59,650 --> 00:06:03,760 sur lesquelles je vous propose de revenir avant d'étudier les 92 00:06:03,960 --> 00:06:08,290 obligations qui pèsent sur l'occupant au moment de la fin de l'autorisation. 93 00:06:08,490 --> 00:06:09,250 a. 94 00:06:09,970 --> 00:06:13,540 Les garanties en faveur de l'occupant évincé. 95 00:06:16,590 --> 00:06:20,640 Lorsque l'administration met fin, de manière anticipée, 96 00:06:20,840 --> 00:06:25,060 à une concession domaniale en la résiliant, donc — je précise, 97 00:06:25,260 --> 00:06:28,390 nous sommes bien face à une concession, à un contrat domanial, 98 00:06:28,590 --> 00:06:32,020 et face à une résiliation —, le droit des contrats s'applique. 99 00:06:33,310 --> 00:06:37,600 En ce sens, si le motif de la résiliation réside dans le comportement 100 00:06:37,800 --> 00:06:41,560 fautif de l'occupant, et que donc la résiliation constitue 101 00:06:41,760 --> 00:06:47,350 une sanction, alors l'occupant évincé n'a droit à aucune indemnité. 102 00:06:49,720 --> 00:06:55,030 En revanche, si le contrat est résilié pour un motif d'intérêt 103 00:06:55,230 --> 00:07:01,090 général, là l'occupant a droit à la réparation intégrale de son 104 00:07:01,290 --> 00:07:02,050 préjudice. 105 00:07:02,250 --> 00:07:07,600 Cette réparation intégrale implique que l'administration, en plus des 106 00:07:07,800 --> 00:07:12,520 dépenses engagées, doit également tenir compte du manque à gagner. 107 00:07:14,740 --> 00:07:18,700 Le propriétaire public doit avancer un motif d'intérêt général. 108 00:07:19,660 --> 00:07:24,370 Mais comme pour le refus de l'autorisation, les motifs d'intérêt 109 00:07:24,570 --> 00:07:25,360 général sont très nombreux. 110 00:07:26,350 --> 00:07:30,610 Et dans tous les cas, l'occupant pourra contester la 111 00:07:30,810 --> 00:07:33,130 décision de résiliation devant le juge du contrat. 112 00:07:33,940 --> 00:07:37,360 Et vous le savez, avant la décision Commune de Béziers de 2011, 113 00:07:37,600 --> 00:07:41,590 il n'était pas possible pour une partie de saisir le juge du contrat 114 00:07:41,790 --> 00:07:45,160 d'une demande d'annulation de la décision de résiliation d'un contrat 115 00:07:45,360 --> 00:07:46,180 administratif classique. 116 00:07:46,380 --> 00:07:51,160 Pourtant, en matière domaniale, sachez que cela faisait longtemps 117 00:07:51,360 --> 00:07:53,530 que cela était possible, depuis précisément la décision 118 00:07:53,730 --> 00:07:59,560 du Conseil d'État du 13 juillet 1968, Société des établissements Serfati qui, 119 00:07:59,800 --> 00:08:04,510 effectivement, permettait à l'occupant, qui subissait la résiliation de 120 00:08:04,710 --> 00:08:07,630 son contrat, de pouvoir saisir le juge du contrat d'une demande 121 00:08:07,830 --> 00:08:09,730 d'annulation de la résiliation. 122 00:08:11,560 --> 00:08:17,170 En outre, dans sa décision en date du 31 juillet 2009, Société Jonathan 123 00:08:17,370 --> 00:08:23,050 Loisirs, le Conseil d'État affirma que, je cite, "si l'autorité domaniale 124 00:08:24,040 --> 00:08:27,520 peut mettre fin avant son terme à un contrat portant autorisation 125 00:08:27,720 --> 00:08:30,280 d'occupation du domaine public pour un motif d'intérêt général, 126 00:08:31,060 --> 00:08:35,320 et en l'absence de toute faute de son cocontractant, ce dernier 127 00:08:35,740 --> 00:08:39,220 est toutefois en droit d'obtenir réparation du préjudice résultant 128 00:08:39,420 --> 00:08:43,180 de cette résiliation unilatérale dès lors qu'aucune stipulation 129 00:08:43,380 --> 00:08:45,250 contractuelle n'y fait obstacle". 130 00:08:46,960 --> 00:08:49,840 Vous en déduisez qu'un aménagement est possible. 131 00:08:50,380 --> 00:08:52,930 En effet, le juge nous dit "dès lors qu'aucune stipulation 132 00:08:53,130 --> 00:08:54,220 contractuelle n'y fait obstacle". 133 00:08:54,420 --> 00:08:58,780 Autrement dit, vous en déduisez que le contrat pourra prévoir qu'il 134 00:08:58,980 --> 00:09:02,920 n'y ait aucune indemnisation, ou il pourra prévoir un montant 135 00:09:03,120 --> 00:09:07,000 maximum indépendant du véritable préjudice. 136 00:09:09,290 --> 00:09:12,560 Pour le moment, vous l'avez constaté, nous avons raisonné sur le cas 137 00:09:12,760 --> 00:09:15,470 d'une résiliation unilatérale d'une concession domaniale. 138 00:09:16,340 --> 00:09:19,730 Mais qu'en est-il en cas d'abrogation d'un titre unilatéral ? 139 00:09:21,530 --> 00:09:25,400 Sachez que pendant longtemps, pour les titres unilatéraux, 140 00:09:25,600 --> 00:09:30,950 il n'y avait pas en principe d'indemnisation, même si en pratique, 141 00:09:31,150 --> 00:09:32,870 le titre pouvait l'organiser. 142 00:09:33,470 --> 00:09:38,300 C'était là une différence fondamentale avec la concession, différence 143 00:09:38,500 --> 00:09:42,320 qui renforçait la précarité du titre unilatéral comparé au contrat, 144 00:09:42,980 --> 00:09:46,220 dès lors qu'il n'y avait pas en principe d'indemnisation, 145 00:09:46,420 --> 00:09:49,190 même en cas d'abrogation pour un motif d'intérêt général. 146 00:09:50,690 --> 00:09:55,100 Mais en 2011, a été inséré au sein du CG3P l'article R. 147 00:09:55,300 --> 00:10:02,180 2125-5, qui dispose ceci : "Lorsque l'autorisation d'occupation 148 00:10:02,380 --> 00:10:05,510 ou d'utilisation du domaine public est retirée avant l'expiration 149 00:10:05,710 --> 00:10:09,590 du terme fixé pour un motif d'intérêt général, le titulaire évincé peut 150 00:10:09,790 --> 00:10:13,010 prétendre, outre à la restitution de la partie de la redevance versée 151 00:10:13,210 --> 00:10:15,740 d'avance et correspondant à la période restant à courir, 152 00:10:16,160 --> 00:10:19,190 à une indemnité égale, sous déduction de l'amortissement 153 00:10:19,390 --> 00:10:22,340 calculée dans les conditions fixées par le titre d'autorisation, 154 00:10:22,820 --> 00:10:26,360 au montant des dépenses exposées pour la réalisation des équipements 155 00:10:26,570 --> 00:10:30,200 et installations expressément autorisées, dans la mesure où ceux-ci 156 00:10:30,440 --> 00:10:37,430 subsistent à la date du retrait." Ainsi, désormais, l'occupant évincé 157 00:10:37,630 --> 00:10:40,670 peut demander le remboursement de la redevance qu'il a versée 158 00:10:40,870 --> 00:10:44,150 à l'avance, et l'indemnisation des dépenses qu'il a engagées pour 159 00:10:44,350 --> 00:10:45,770 équiper la dépendance. 160 00:10:45,970 --> 00:10:49,770 Cependant, et vous l'avez compris, l'indemnisation n'est donc pas 161 00:10:49,970 --> 00:10:53,370 aussi avantageuse que pour l'occupant contractuel, qui a droit à une 162 00:10:53,570 --> 00:10:57,600 réparation intégrale, lui, intégrant donc le manque à gagner. 163 00:10:57,800 --> 00:11:05,410 Néanmoins, le titre unilatéral peut prévoir et organiser une autre 164 00:11:05,610 --> 00:11:07,630 forme d'indemnisation plus avantageuse. 165 00:11:10,370 --> 00:11:14,630 Je voudrais faire une petite remarque avant de terminer cette vidéo. 166 00:11:14,830 --> 00:11:20,990 Classiquement, on s'appuie justement sur la précarité du titre pour 167 00:11:21,590 --> 00:11:26,720 en déduire qu'il n'est pas opposable à l'administration. 168 00:11:26,920 --> 00:11:27,740 Or, c'est faux. 169 00:11:28,790 --> 00:11:33,500 En effet, la précarité du titre, traduite par la précarité de la 170 00:11:33,700 --> 00:11:38,240 situation de l'occupant pour conserver son autorisation, et ce, 171 00:11:38,750 --> 00:11:42,740 en dehors des atténuations en raison des possibles indemnisations, 172 00:11:43,550 --> 00:11:50,920 ne doit pas amoindrir l'effectivité du droit qu'il a à occuper paisiblement 173 00:11:51,120 --> 00:11:51,880 le domaine. 174 00:11:52,080 --> 00:11:55,590 Nous l'avons vu, le temps que durera ladite autorisation, 175 00:11:55,790 --> 00:12:00,500 ce droit se traduit par une obligation à la charge du propriétaire public. 176 00:12:00,980 --> 00:12:06,080 La précarité, elle-même limitée du titre, ne doit pas nous aveugler 177 00:12:06,280 --> 00:12:11,960 et nous conduire à finalement représenter l'occupant comme sans 178 00:12:12,160 --> 00:12:16,610 défense aucune face à l'administration, qui viendrait troubler sa jouissance, 179 00:12:16,810 --> 00:12:19,700 à moins de considérer qu'à chaque fois que tel est le cas, 180 00:12:19,970 --> 00:12:23,240 l'administration a finalement entendu implicitement résilier le contrat 181 00:12:23,440 --> 00:12:24,200 domaniale. 182 00:12:24,560 --> 00:12:27,260 Chose impossible, soit parce qu'elle doit être prononcée par le juge, 183 00:12:27,530 --> 00:12:28,290 soit motivée. 184 00:12:28,490 --> 00:12:32,630 Oui, le titre est précaire, mais cela ne signifie pas que la 185 00:12:32,830 --> 00:12:36,020 situation de l'occupant, tant que le titre n'est pas abrogé, 186 00:12:36,220 --> 00:12:40,190 résilié ou simplement terminé, est fragile, et qu'il est à la 187 00:12:40,390 --> 00:12:42,560 merci totale du propriétaire public. 188 00:12:42,760 --> 00:12:43,520 b. 189 00:12:45,750 --> 00:12:49,560 Les obligations qui pèsent sur l'occupant évincé. 190 00:12:52,030 --> 00:12:53,290 Le principe est le suivant. 191 00:12:54,880 --> 00:12:59,050 L'occupant doit remettre en l'état la dépendance du domaine public. 192 00:12:59,650 --> 00:13:04,030 Dégagée notamment dans la décision du Conseil d'État du 4 mars 1991, 193 00:13:04,270 --> 00:13:09,490 Palanque, que nous avons déjà croisée, cette règle de la mise en état 194 00:13:09,940 --> 00:13:11,700 est aujourd'hui consacrée à l'article L. 195 00:13:11,900 --> 00:13:13,750 2122-9 du CG3P. 196 00:13:13,950 --> 00:13:18,160 Cependant, cette règle est plus subtile qu'il n'y paraît. 197 00:13:18,360 --> 00:13:23,080 D'abord, il faut revenir à la distinction des biens construits 198 00:13:23,280 --> 00:13:24,130 sur le domaine public. 199 00:13:25,060 --> 00:13:28,510 Vous savez que les biens de retour et de reprise ne sont pas concernés, 200 00:13:28,710 --> 00:13:32,410 car ils sont ou deviennent la propriété de la personne publique, 201 00:13:32,610 --> 00:13:36,190 en raison de leur nécessité ou l'utilité à un service public. 202 00:13:36,910 --> 00:13:39,940 Ils appartiennent au domaine public, et ne sont donc bien évidemment 203 00:13:40,140 --> 00:13:41,920 pas visés par la règle de la remise en état. 204 00:13:44,120 --> 00:13:47,180 Il faut donc nous intéresser aux biens propres, ceux qui restent 205 00:13:47,380 --> 00:13:50,270 la propriété de l'occupant au moment de la fin de l'autorisation. 206 00:13:50,470 --> 00:13:54,110 Concrètement, on peut distinguer trois hypothèses. 207 00:13:55,160 --> 00:13:56,270 La première hypothèse. 208 00:13:58,100 --> 00:14:03,410 Rien n'a été prévu par le titre d'occupation, et l'administration 209 00:14:03,610 --> 00:14:04,670 demande la destruction des biens. 210 00:14:04,870 --> 00:14:09,290 Dans ce cas, l'occupant doit quitter les lieux et détruire les ouvrages. 211 00:14:10,820 --> 00:14:13,460 C'est là le propre de la règle de la remise en état. 212 00:14:13,660 --> 00:14:21,110 C'est la solution de principe, et ce, peu importe que l'occupant 213 00:14:21,310 --> 00:14:22,320 soit titulaire ou non de droit réel. 214 00:14:23,600 --> 00:14:29,750 C'est donc à l'occupant de s'occuper, et donc de financer la démolition 215 00:14:29,950 --> 00:14:30,710 des ouvrages. 216 00:14:32,060 --> 00:14:34,550 La Cour européenne des droits de l'homme s'est prononcée sur ce 217 00:14:34,750 --> 00:14:36,950 point dans l'affaire Depalle contre France en 2010. 218 00:14:38,570 --> 00:14:42,380 Les époux Depalle avaient acheté en 1960 une maison d'habitation 219 00:14:43,250 --> 00:14:44,780 située sur le domaine public maritime. 220 00:14:46,220 --> 00:14:51,560 Après l'adoption d'une loi relative à la protection du littoral en 1986, 221 00:14:52,880 --> 00:14:56,840 l'administration a décidé de ne plus autoriser l'occupation. 222 00:14:58,280 --> 00:15:01,280 Les propriétaires de la maison, et pas du terrain d'assiette, 223 00:15:01,480 --> 00:15:06,350 donc, étaient confrontés à un refus de renouvellement et à une demande 224 00:15:06,590 --> 00:15:10,430 de destruction de la maison, puisqu'ils devaient restituer le 225 00:15:10,630 --> 00:15:11,570 domaine en l'état. 226 00:15:12,630 --> 00:15:16,020 Les époux Depalle ont invoqué une violation de leur droit de propriété. 227 00:15:17,250 --> 00:15:20,970 La Cour européenne des droits de l'homme a estimé que le titre 228 00:15:21,170 --> 00:15:24,930 d'occupation était assez clair, sur le fait que la maison devait 229 00:15:25,130 --> 00:15:29,670 être détruite à la fin de l'occupation, et que cela ne donnerait pas lieu 230 00:15:30,180 --> 00:15:33,750 à une indemnisation, et de juger qu'il n'y avait pas de violation 231 00:15:33,950 --> 00:15:36,540 du droit de propriété, donc pas de violation du premier 232 00:15:36,740 --> 00:15:37,500 protocole. 233 00:15:39,270 --> 00:15:40,110 Deuxième hypothèse. 234 00:15:40,740 --> 00:15:44,760 L'administration demande expressément à l'occupant de laisser ses ouvrages 235 00:15:44,960 --> 00:15:45,720 sur le domaine. 236 00:15:45,920 --> 00:15:49,830 Dans ce cas, par le biais de la règle de l'accession, qui nous 237 00:15:50,030 --> 00:15:53,010 vient du droit civil, les ouvrages deviennent gratuitement 238 00:15:53,210 --> 00:15:54,930 la propriété de l'administration. 239 00:15:55,130 --> 00:15:58,830 Voyez, pour exemple, la décision du 21 avril 1997, 240 00:15:59,100 --> 00:16:00,320 Conseil d'État, Société SAGIFA. 241 00:16:02,880 --> 00:16:03,780 Troisième hypothèse. 242 00:16:03,980 --> 00:16:09,420 L'administration ne demande strictement rien à la fin de l'autorisation 243 00:16:09,620 --> 00:16:11,520 d'occupation, ni destruction, ni laisser les ouvrages. 244 00:16:12,930 --> 00:16:19,320 Dans ce cas, à l'issue d'un délai raisonnable, apprécié par le juge, 245 00:16:20,040 --> 00:16:24,000 les ouvrages construits deviennent gratuitement la propriété de la 246 00:16:24,200 --> 00:16:27,090 personne publique, et elle ne peut alors plus rien demander à l'ancien 247 00:16:27,290 --> 00:16:30,990 occupant, conformément à ce qu'a décidé le Conseil d'État en 1969 248 00:16:31,190 --> 00:16:32,850 dans société Koeberlin. 249 00:16:33,050 --> 00:16:37,230 Notez, pour terminer, que les partis peuvent tout à fait 250 00:16:37,430 --> 00:16:41,280 prévoir, entre eux, des modalités particulières de répartition des 251 00:16:41,480 --> 00:16:43,620 biens à la fin de l'occupation.