1 00:00:06,580 --> 00:00:07,340 Bonjour. 2 00:00:07,540 --> 00:00:10,140 Revenons sur l'étude des cas de rétroactivité, de rétroactivité 3 00:00:10,340 --> 00:00:11,100 de droit. 4 00:00:11,300 --> 00:00:12,900 Alors, je vais évoquer, mais un peu de théorique, 5 00:00:13,100 --> 00:00:13,860 les cas de figure. 6 00:00:14,060 --> 00:00:16,360 Prenons un exemple concret du cas le plus intéressant, 7 00:00:16,560 --> 00:00:18,620 le plus important, qui est celui des lois de validation. 8 00:00:19,020 --> 00:00:23,700 Alors, citons un exemple jurisprudentiel et on peut par 9 00:00:23,900 --> 00:00:28,260 exemple partir de la décision du Conseil constitutionnel du 23 septembre 10 00:00:28,460 --> 00:00:29,380 2011, Yannick N. 11 00:00:29,580 --> 00:00:33,360 , alors, on ne va pas faire beaucoup de suspense, il s'agit d'un joueur 12 00:00:33,560 --> 00:00:36,180 de tennis, enfin qui a eu en tout cas une carrière assez notoire 13 00:00:36,380 --> 00:00:40,160 de joueur de tennis, et qui a décidé à un moment donné 14 00:00:40,360 --> 00:00:43,440 de sa carrière de partir en Suisse pour différentes raisons, 15 00:00:43,640 --> 00:00:46,320 peut-être notamment fiscales, mais pas forcément, peu importe. 16 00:00:46,520 --> 00:00:49,660 En tout cas, il se trouve que Yannick N, Yannick Noah, vous l'avez compris, 17 00:00:50,200 --> 00:00:54,640 a fait l'objet d'un contrôle fiscal comme tout un tas d'autres 18 00:00:54,840 --> 00:00:59,760 contribuables, anciennement français et donc néo-résidents fiscaux suisses. 19 00:00:59,960 --> 00:01:02,620 Et il se trouve que l'un de ces contribuables, ça n'était pas Yannick 20 00:01:02,820 --> 00:01:08,000 Noah, mais l'un de ces contribuables, a porté devant les tribunaux français, 21 00:01:08,960 --> 00:01:12,460 le litige concernant sa situation, en estimant qu'il avait fait l'objet 22 00:01:12,660 --> 00:01:17,800 d'un contrôle fiscal sur une base juridique qui avait été mal interprétée 23 00:01:18,000 --> 00:01:21,020 par l'administration fiscale, en gros qu'une procédure de contrôle 24 00:01:21,220 --> 00:01:24,740 avait été mise en œuvre à son égard, sur un fondement législatif qui 25 00:01:24,940 --> 00:01:26,400 ne pouvait pas trouver à s'appliquer à l'étranger. 26 00:01:26,600 --> 00:01:30,840 Et il se trouve que ce contribuable a gagné devant, au bout du compte, 27 00:01:31,040 --> 00:01:35,280 le Conseil d'État, c'était en juillet 1996, alors inutile de noter les 28 00:01:35,480 --> 00:01:39,160 références exactes, retenons simplement le mécanisme intellectuel et c'est 29 00:01:39,360 --> 00:01:41,940 ce qui va suivre, donc ce contribuable, M. 30 00:01:42,140 --> 00:01:44,140 X, gagne devant le Conseil d'État. 31 00:01:44,340 --> 00:01:48,040 Le Conseil d'État effectivement lui accorde la décharge de 32 00:01:48,240 --> 00:01:51,400 l'imposition, c'est-à-dire que considère que l'impôt réclamé sur 33 00:01:51,600 --> 00:01:56,580 le fondement d'une procédure illégale, évidemment est lui-même illégal, 34 00:01:57,020 --> 00:02:02,940 et donc l'impôt est restitué finalement à l'issue du contrôle annulé par 35 00:02:03,140 --> 00:02:03,900 le juge. 36 00:02:04,180 --> 00:02:06,980 Yannick Noah comme d'autres contribuables, en tout cas leurs 37 00:02:07,180 --> 00:02:10,780 avocats, sont informés évidemment de cette décision du Conseil d'État 38 00:02:10,980 --> 00:02:14,720 et se rendent compte qu'ils ont eux-mêmes souffert d'une procédure 39 00:02:14,920 --> 00:02:18,460 équivalente avec au bout du compte un redressement fiscal lié donc 40 00:02:18,660 --> 00:02:20,540 à cette procédure qui, d'après le Conseil d'État, 41 00:02:20,740 --> 00:02:23,040 était illégale, car la procédure, encore une fois, était la même, 42 00:02:23,240 --> 00:02:25,820 en tout cas elle a été fondée de la même manière sur la même disposition 43 00:02:26,020 --> 00:02:26,780 législative. 44 00:02:26,980 --> 00:02:31,680 Sauf que face justement à ce risque en quelque sorte de contamination, 45 00:02:31,880 --> 00:02:37,260 de propagation, de contentieux, d'imitation en gros par de nouveaux 46 00:02:37,460 --> 00:02:40,980 contribuables de celui qui vient de triompher devant le juge, 47 00:02:41,520 --> 00:02:45,340 il y a bien sûr un risque pour les finances publiques que les 48 00:02:45,540 --> 00:02:49,040 décisions, allant dans le même sens que la première que celle 49 00:02:49,240 --> 00:02:50,000 que je viens de citer, se multiplient. 50 00:02:50,200 --> 00:02:54,980 Et donc dans ce type de situation, il n'est pas rare que le législateur, 51 00:02:55,180 --> 00:02:57,720 alors informé évidemment par l'administration fiscale et par 52 00:02:57,920 --> 00:03:03,720 le gouvernement, vienne adopter un dispositif qui va spécifiquement 53 00:03:03,920 --> 00:03:10,140 venir valider l'ensemble de ces actes d'imposition, donc tels que 54 00:03:10,340 --> 00:03:14,900 celui reçu par Yannick Noah dans mon affaire, venant donc préciser 55 00:03:15,100 --> 00:03:18,160 en toutes lettres et de manière très expresse qu'il n'est pas possible 56 00:03:18,360 --> 00:03:22,140 de contester devant les juridictions un acte d'imposition sur le fondement 57 00:03:22,340 --> 00:03:26,120 de sa contrariété à bla-bla-bla, bla-bla-bla étant ce que le juge 58 00:03:26,320 --> 00:03:27,460 avait retenu dans le cas de M. 59 00:03:27,660 --> 00:03:31,280 X pour considérer que l'acte d'imposition était contraire à la loi. 60 00:03:31,520 --> 00:03:36,140 Et donc la loi vient légaliser, valider encore une fois rétroactivement 61 00:03:36,340 --> 00:03:39,620 un certain nombre de procédures en effaçant finalement une illégalité 62 00:03:39,820 --> 00:03:42,180 qu'un juge avait pu détecter. 63 00:03:42,660 --> 00:03:45,900 Alors c'est évidemment relativement violent pour les contribuables 64 00:03:46,100 --> 00:03:49,200 qui apprennent qu'ils avaient été traités illégalement et qui quelques 65 00:03:49,400 --> 00:03:51,220 jours plus tard ou quelques mois plus tard apprennent qu'ils ne 66 00:03:51,420 --> 00:03:53,620 peuvent pour autant pas s'en plaindre. 67 00:03:54,100 --> 00:03:57,840 Et donc ça, c'est la version si vous voulez, bon sens, 68 00:03:58,040 --> 00:04:00,780 de l'appréhension de cette situation, mais il y a aussi une appréhension 69 00:04:00,980 --> 00:04:03,760 juridique de cette situation par le Conseil constitutionnel qui 70 00:04:03,960 --> 00:04:08,620 considère qu'en effet par principe, il y a bien une forme de violation 71 00:04:08,820 --> 00:04:11,580 de la garantie des droits, ces interventions rétroactives 72 00:04:11,780 --> 00:04:15,640 du législateur dans le cadre des lois de validation et que donc 73 00:04:15,840 --> 00:04:20,640 cette intervention contraire par principe à la garantie des droits 74 00:04:20,840 --> 00:04:24,800 à l'article 16 de la DDHC justifie un contrôle assez serré de ces 75 00:04:25,000 --> 00:04:27,860 dispositifs qui donc peuvent être malgré tout conformes à la 76 00:04:28,060 --> 00:04:30,800 Constitution, mais au terme justement d'un contrôle qui vient mettre 77 00:04:31,000 --> 00:04:36,000 en balance d'un côté la garantie des droits, la sécurité juridique 78 00:04:36,200 --> 00:04:38,500 plus généralement même si l'expression n'est pas employée par le Conseil 79 00:04:38,700 --> 00:04:41,480 constitutionnel, mais il y a bien cette idée d'un côté et d'un autre 80 00:04:41,680 --> 00:04:44,740 côté les différentes justifications possibles à cette intervention 81 00:04:44,940 --> 00:04:48,320 rétroactive du législateur que le Conseil va apprécier. 82 00:04:48,600 --> 00:04:53,160 Alors justement dans l'affaire Noah comme dans toutes les affaires 83 00:04:53,360 --> 00:04:55,580 de loi de validation, car la jurisprudence est ici 84 00:04:55,780 --> 00:04:58,020 relativement stable en tout cas dans l'énoncé des principes, 85 00:04:59,220 --> 00:05:01,600 après dans leur mise en œuvre, il y a évidemment des variations, 86 00:05:02,580 --> 00:05:05,880 on trouve en réalité trois séries de limites qui vont permettre de 87 00:05:06,080 --> 00:05:09,100 comprendre à quelles conditions une intervention rétroactive et 88 00:05:09,300 --> 00:05:11,000 notamment une loi de validation est constitutionnelle. 89 00:05:11,200 --> 00:05:14,140 Alors la première limite elle est assez évidente et je n'y insisterai 90 00:05:14,340 --> 00:05:17,560 pas, c'est que le Conseil constitutionnel estime que, 91 00:05:17,760 --> 00:05:21,760 comme on y reviendra un tout petit peu plus tard, les sanctions fiscales 92 00:05:21,960 --> 00:05:25,220 sont assimilées à des punitions et donc finalement des sanctions 93 00:05:25,420 --> 00:05:27,740 pénales du point de vue des règles constitutionnelles qui s'appliquent 94 00:05:27,940 --> 00:05:31,680 à elles, ce qui implique qu'il n'est pas possible pour le législateur 95 00:05:31,880 --> 00:05:36,540 fiscal d'intervenir rétroactivement en matière de sanctions sauf 96 00:05:36,740 --> 00:05:39,600 rétroactivité dite in mitius, c'est-à-dire en gros l'application 97 00:05:39,800 --> 00:05:42,760 de la loi pénale plus douce, et donc de la loi de sanctions 98 00:05:42,960 --> 00:05:48,000 fiscales, la loi répressive fiscale plus douce à des situations qui 99 00:05:48,200 --> 00:05:50,900 constituaient avant l'entrée en vigueur du texte en question, 100 00:05:51,100 --> 00:05:53,620 ou plutôt avant la promulgation du texte en question. 101 00:05:53,820 --> 00:05:56,400 Donc, concrètement, et c'est simplement ça qu'il faut retenir, 102 00:05:56,700 --> 00:06:00,620 le législateur ne peut pas prévoir pour le passé de nouvelles infractions 103 00:06:00,820 --> 00:06:03,580 fiscales, de nouvelles peines fiscales sauf à ce que ces dernières soient 104 00:06:03,780 --> 00:06:05,620 évidemment plus douces et là, elles trouveront à s'appliquer 105 00:06:05,820 --> 00:06:08,580 immédiatement y compris aux procès en cours et aux procédures en cours. 106 00:06:09,220 --> 00:06:12,940 Bien, ce cas n'est pas très important et encore une fois, c'est une imitation 107 00:06:13,140 --> 00:06:16,380 du droit pénal et c'est un principe issu directement de l'article 8 108 00:06:16,580 --> 00:06:18,500 de la Déclaration des droits l'homme et du citoyen en matière pénale 109 00:06:18,700 --> 00:06:20,120 comme en matière fiscale, je passe sur ce point. 110 00:06:20,320 --> 00:06:23,580 Deuxième point un peu plus intéressant, deuxième condition essentielle, 111 00:06:23,860 --> 00:06:28,860 le Conseil constitutionnel estime que ces interventions législatives 112 00:06:29,060 --> 00:06:33,380 rétroactives ne doivent pas porter atteinte à l'autorité de la chose 113 00:06:33,580 --> 00:06:34,340 jugée. 114 00:06:34,600 --> 00:06:37,680 Alors là, il y a un point un peu technique à bien préciser, 115 00:06:38,360 --> 00:06:40,840 l'idée et la source du principe, les deux vont ensemble, 116 00:06:41,040 --> 00:06:44,580 c'est assez simple, c'est le souci tiré de l'article 16 de la séparation 117 00:06:44,780 --> 00:06:45,540 des pouvoirs. 118 00:06:45,760 --> 00:06:48,780 En réalité, l'idée est que la séparation des pouvoirs serait 119 00:06:48,980 --> 00:06:51,880 violée si le législateur pouvait remettre en cause des décisions 120 00:06:52,080 --> 00:06:55,360 de justice, alors attention, des décisions de justice, 121 00:06:55,700 --> 00:06:59,200 je mets des guillemets, passées en force de choses jugées. 122 00:06:59,960 --> 00:07:01,980 Cette expression un peu barbare que vous avez peut-être déjà 123 00:07:02,180 --> 00:07:05,360 rencontrée, notamment en procédure civile, renvoie concrètement aux 124 00:07:05,560 --> 00:07:08,100 décisions qui ne peuvent plus faire l'objet d'une voie de recours 125 00:07:08,300 --> 00:07:10,180 ordinaire, mais seulement d'une voie de recours extraordinaire, 126 00:07:10,660 --> 00:07:13,180 concrètement, il s'agit des décisions d'appel. 127 00:07:13,880 --> 00:07:19,520 Donc si, imaginons que vous êtes Yannick Noah, si vous avez obtenu 128 00:07:19,720 --> 00:07:23,460 une décision de la Cour administrative d'appel qui effectivement vient 129 00:07:23,660 --> 00:07:26,740 annuler votre redressement et que l'administration fiscale s'est 130 00:07:26,940 --> 00:07:29,420 pourvue en cassation, vous êtes protégé, vous êtes tranquille 131 00:07:29,620 --> 00:07:33,340 si je puis dire, la loi ne pourra pas changer en cours de procès 132 00:07:33,540 --> 00:07:36,300 de cassation, en tout cas, pour ce qui vous concerne, 133 00:07:36,500 --> 00:07:40,080 vous serez protégé, car en tant que vous avez bénéficié d'une décision 134 00:07:40,280 --> 00:07:42,940 d'appel et donc d'une décision passée en force de choses jugées 135 00:07:43,140 --> 00:07:45,040 qui ne peut plus faire l'objet d'une voie de recours ordinaire, 136 00:07:45,240 --> 00:07:48,620 mais seulement d'une voie de recours extraordinaire, ce serait une atteinte 137 00:07:48,820 --> 00:07:53,460 à l'autorité de la chose jugée par la Cour d'appel que le législateur 138 00:07:53,660 --> 00:07:57,860 vienne contrecarrer finalement le dispositif du juge en exigeant 139 00:07:58,060 --> 00:07:59,900 du juge de cassation qu'il juge dans un sens différent. 140 00:08:00,360 --> 00:08:03,200 En revanche, si, et c'était le cas si ma mémoire est bonne de 141 00:08:03,400 --> 00:08:07,520 Yannick Noah, si vous avez simplement obtenu une décision du tribunal 142 00:08:07,720 --> 00:08:12,120 administratif ou du tribunal judiciaire le cas échéant, bref d'un juge 143 00:08:12,320 --> 00:08:15,460 de première instance, il est tout à fait possible en 144 00:08:15,660 --> 00:08:18,500 cours de procédure d'appel qu'une loi intervienne et vienne en fait 145 00:08:18,700 --> 00:08:22,220 modifier les règles du jeu donc en cours de route et vienne considérer 146 00:08:22,420 --> 00:08:26,600 que finalement, ce que le TA avait jugé illégal est légal parce que 147 00:08:26,800 --> 00:08:29,960 la loi a changé rétroactivement de sorte que la Cour administrative 148 00:08:30,160 --> 00:08:32,820 d'appel lorsque vous arrivez devant elle pour faire juger votre affaire 149 00:08:33,020 --> 00:08:35,840 dira, je suis désolée, je ne peux plus juger comme l'avait 150 00:08:36,040 --> 00:08:37,900 fait le Conseil d'État il y a encore quelques semaines ou quelques mois 151 00:08:38,100 --> 00:08:42,340 parce que la loi vient de changer rétroactivement et vient de considérer, 152 00:08:42,540 --> 00:08:45,140 c'était le cas Yannick Noah, que la procédure de contrôle suivie 153 00:08:45,340 --> 00:08:49,140 était parfaitement légale et donc je ne peux pas vous donner raison. 154 00:08:49,620 --> 00:08:52,620 Reste une dernière chose et j'en viens en réalité à la troisième 155 00:08:52,820 --> 00:08:55,140 série de conditions de constitutionnalité de ce type 156 00:08:55,340 --> 00:08:57,500 d'intervention, et c'est ce qu'avait soulevé Yannick Noah, 157 00:08:57,700 --> 00:09:00,440 en tout cas c'est le représentant, c'est la question de savoir si 158 00:09:00,640 --> 00:09:04,700 cette intervention rétroactive en cours de procès n'est pas 159 00:09:04,900 --> 00:09:07,580 insuffisamment justifiée au regard de l'intérêt général, 160 00:09:07,920 --> 00:09:11,640 c'est donc la troisième condition qui tient au motif d'intérêt général 161 00:09:11,840 --> 00:09:16,280 suffisant qui doivent porter finalement cette intervention rétroactive 162 00:09:16,480 --> 00:09:19,420 pour que le Conseil constitutionnel la juge conforme à l'article 16 163 00:09:19,620 --> 00:09:20,640 et globalement à la Constitution. 164 00:09:20,840 --> 00:09:24,900 Il y a donc ici une sorte de contrôle, je disais, de proportionnalité, 165 00:09:25,100 --> 00:09:28,660 de mise en balance du niveau d'atteinte à la garantie des droits d'une 166 00:09:28,860 --> 00:09:31,940 part et du niveau d'intérêt général susceptible de la justifier. 167 00:09:32,580 --> 00:09:35,600 Alors, on revient sur quelque chose qu'on a déjà envisagé, 168 00:09:35,800 --> 00:09:38,980 le Conseil constitutionnel considère par principe que, évidemment, 169 00:09:39,480 --> 00:09:42,320 toutes ces interventions rétroactives en matière fiscale sont motivées 170 00:09:42,520 --> 00:09:45,640 d'abord par un motif financier, c'est toujours une manière pour 171 00:09:45,840 --> 00:09:49,040 l'État de perdre moins d'argent en évitant d'avoir à rembourser 172 00:09:49,240 --> 00:09:50,140 un certain nombre de contribuables. 173 00:09:50,340 --> 00:09:53,020 Donc ce motif est un motif d'intérêt général, bien sûr, il est pris 174 00:09:53,220 --> 00:09:57,180 en compte, mais à lui seul ne peut pas, en principe, justifier une telle 175 00:09:57,380 --> 00:09:58,140 intervention. 176 00:09:58,340 --> 00:10:00,220 C'est la raison pour laquelle il faut d'autres motifs. 177 00:10:00,420 --> 00:10:04,860 Et ces autres motifs peuvent tenir, par exemple, au refus du législateur 178 00:10:05,060 --> 00:10:08,240 de voir une sorte d'effet d'aubaine se propager avec des contribuables 179 00:10:08,440 --> 00:10:12,080 finalement qui vont récupérer de l'argent alors même que seul un 180 00:10:12,280 --> 00:10:18,800 motif de procédure est à l'origine de l'annulation du dispositif 181 00:10:19,000 --> 00:10:21,600 problématique et que, en réalité, l'impôt était dû sur 182 00:10:21,800 --> 00:10:25,280 le fond, mais que c'est une raison de procédure qui a conduit à 183 00:10:25,480 --> 00:10:28,600 l'annulation par le Conseil d'État dans mon affaire, encore une fois, 184 00:10:28,960 --> 00:10:32,100 de tout le contrôle et finalement le redressement. 185 00:10:32,360 --> 00:10:38,480 Bref, lorsqu'il y a des justifications d'intérêt général autres le fait 186 00:10:38,680 --> 00:10:42,260 de ne pas désorganiser l'administration fiscale avec un risque d'afflux 187 00:10:42,460 --> 00:10:46,240 considérable de requêtes, par exemple, ou encore des motifs 188 00:10:46,440 --> 00:10:51,580 tenant plus généralement au fait que l'administration aura des 189 00:10:51,780 --> 00:10:55,380 difficultés à identifier les personnes qui devraient être remboursées ou pas. 190 00:10:55,580 --> 00:10:59,480 Bref, c'est un peu une question, oserais-je dire, de storytelling. 191 00:10:59,680 --> 00:11:02,820 En tout cas, c'est au gouvernement et au Parlement de trouver une 192 00:11:03,020 --> 00:11:06,340 histoire pour expliquer qu'il y a plein de motifs d'intérêt général 193 00:11:06,540 --> 00:11:09,400 autres que celui simplement consistant à récupérer un peu d'argent ou 194 00:11:09,600 --> 00:11:11,920 à éviter d'en perdre, qui vont permettre au Conseil 195 00:11:12,120 --> 00:11:15,060 constitutionnel d'être convaincu ou pas de la pertinence et donc 196 00:11:15,260 --> 00:11:17,220 de la constitutionnalité de l'intervention rétroactive. 197 00:11:17,520 --> 00:11:21,420 Alors, le suspense n'est pas énorme, mais dans l'affaire encore une 198 00:11:21,620 --> 00:11:24,600 fois Noah jugée en 2011, c'était une QPC, le Conseil 199 00:11:24,800 --> 00:11:27,040 constitutionnel a estimé qu'effectivement, un certain nombre 200 00:11:27,240 --> 00:11:30,780 de motifs d'intérêt général suffisant était bien présent pour justifier 201 00:11:30,980 --> 00:11:33,300 cette intervention rétroactive du législateur et notamment le 202 00:11:33,500 --> 00:11:36,000 fait encore une fois que c'était essentiellement un motif procédural 203 00:11:36,200 --> 00:11:39,280 qui était à l'origine de l'annulation litigieuse et donc finalement de 204 00:11:39,480 --> 00:11:42,760 l'intervention du législateur ensuite pour éviter la contamination, 205 00:11:42,960 --> 00:11:47,800 si je puis dire, de nouveaux contentieux de ce premier contentieux 206 00:11:48,000 --> 00:11:51,700 et que donc finalement, Yannick Noah n'a pas pu récupérer 207 00:11:51,900 --> 00:11:54,980 les sommes qu'il demandait, puisque la loi de validation a 208 00:11:55,180 --> 00:12:03,440 effectivement mis un terme finalement à son affaire, à sa requête. 209 00:12:03,640 --> 00:12:09,720 Alors, au-delà de ce cas et je conclus avec cela, il est assez 210 00:12:09,920 --> 00:12:11,680 fréquent, je le répète, que le Conseil constitutionnel 211 00:12:11,880 --> 00:12:14,940 soit saisi de ce type de cas, il est arrivé dans un certain nombre 212 00:12:15,140 --> 00:12:18,700 de décisions, parfois de manière assez subtile, qu'il vienne annuler 213 00:12:18,900 --> 00:12:23,120 parfois tout un dispositif ou une partie seulement d'un dispositif 214 00:12:23,320 --> 00:12:26,860 rétroactif pour une période seulement, considérant que pour une certaine 215 00:12:27,060 --> 00:12:29,940 période, l'intérêt général n'est pas suffisant parce qu'il y a trop 216 00:12:30,140 --> 00:12:32,580 peu de contribuables concernés et que donc ça ne coûtera pas si 217 00:12:32,780 --> 00:12:35,660 cher que ça et que ça ne désorganisera pas l'administration fiscale. 218 00:12:35,860 --> 00:12:39,020 Je pense notamment à une décision du 7 février 2002 qui concernait 219 00:12:39,220 --> 00:12:42,200 un impôt foncier en Polynésie française où le Conseil constitutionnel assez 220 00:12:42,400 --> 00:12:44,960 subtilement a distingué de cette manière deux périodes. 221 00:12:46,100 --> 00:12:50,860 En tout cas, c'est une jurisprudence relativement stable comme je le 222 00:12:51,060 --> 00:12:54,520 disais sur le terrain des principes que le Conseil constitutionnel 223 00:12:54,720 --> 00:12:58,980 vient manier en matière fiscale de manière relativement fréquente, 224 00:12:59,280 --> 00:13:03,740 je le répète, tant il est relativement fréquent que le législateur se 225 00:13:03,940 --> 00:13:06,120 lance dans ce genre d'opérations. 226 00:13:06,320 --> 00:13:08,760 Voilà donc pour la question de la rétroactivité de fait et de droit. 227 00:13:09,020 --> 00:13:13,960 Voyons alors en quelques mots seulement dans ce deuxième paragraphe qui 228 00:13:14,160 --> 00:13:16,800 sera en fait prolongé par une présentation de la question un 229 00:13:17,000 --> 00:13:19,420 peu plus tard, voyons paragraphe deuxième, les limites aux sanctions 230 00:13:19,620 --> 00:13:20,380 fiscales. 231 00:13:20,720 --> 00:13:24,120 Alors les limites aux sanctions fiscales, je ne fais que les évoquer, 232 00:13:24,320 --> 00:13:28,780 car un paragraphe spécifique sera consacré donc à la présentation 233 00:13:28,980 --> 00:13:32,320 des différentes formes de sanctions que l'administration fiscale peut 234 00:13:32,520 --> 00:13:33,280 édicter. 235 00:13:33,640 --> 00:13:37,160 Donc retenons à ce stade tout simplement que le Conseil 236 00:13:37,360 --> 00:13:41,920 constitutionnel, je l'ai déjà suggéré, vient contrôler la conformité à 237 00:13:42,120 --> 00:13:44,220 la Constitution et tout particulièrement à l'article 8 238 00:13:44,420 --> 00:13:46,440 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 239 00:13:47,220 --> 00:13:52,300 les différentes sanctions que le législateur permet à l'administration 240 00:13:52,500 --> 00:13:58,360 d'édicter, sans avoir donc à saisir le juge répressif en l'occurrence. 241 00:13:58,560 --> 00:14:03,040 Et donc c'est les normes de constitutionnalité qui trouvent 242 00:14:03,240 --> 00:14:06,620 à s'appliquer au quotidien à la matière pénale qui sont reproduites 243 00:14:06,820 --> 00:14:10,040 pour l'essentiel par le Conseil constitutionnel à la matière fiscale 244 00:14:10,240 --> 00:14:13,540 comme à l'ensemble des sanctions administratives en général. 245 00:14:15,300 --> 00:14:19,320 Alors nous le verrons, le contrôle n'est pas d'une extrême 246 00:14:19,520 --> 00:14:20,280 sévérité. 247 00:14:20,480 --> 00:14:23,860 Le Conseil a eu quelques occasions de juger les dispositifs répressifs 248 00:14:24,060 --> 00:14:25,300 contraires à la Constitution. 249 00:14:25,500 --> 00:14:28,900 Pour l'essentiel, et il y en a des centaines en vérité comme on 250 00:14:29,100 --> 00:14:32,640 le verra, le Conseil constitutionnel a eu plutôt tendance à estimer 251 00:14:32,840 --> 00:14:36,740 que les dispositifs présents dans la loi française respectent la 252 00:14:36,940 --> 00:14:39,460 Constitution, tout comme, on le verra aussi, il respecte 253 00:14:39,660 --> 00:14:41,940 l'essentiel des normes européennes. 254 00:14:42,340 --> 00:14:45,220 Alors même que la question n'a pas toujours été si évidente que cela, 255 00:14:46,080 --> 00:14:50,180 le Conseil constitutionnel a évidemment le souci, et ça semble relativement 256 00:14:50,380 --> 00:14:52,980 justifié et légitime, de permettre à l'administration 257 00:14:53,180 --> 00:14:57,160 d'assurer son travail en lui permettant évidemment de sanctionner les 258 00:14:57,360 --> 00:15:00,660 contribuables qui viennent à manquer à leurs obligations, 259 00:15:01,580 --> 00:15:04,000 ce qui est évidemment tout à fait essentiel dans un système comme 260 00:15:04,200 --> 00:15:05,820 le système français, comme la plupart des systèmes dans 261 00:15:06,020 --> 00:15:08,580 le monde, qui sont essentiellement déclaratifs, et donc évidemment 262 00:15:08,780 --> 00:15:11,960 sans sanction, il est difficile de tout à fait motiver les 263 00:15:12,160 --> 00:15:13,740 contribuables à être parfaitement honnêtes. 264 00:15:14,020 --> 00:15:19,940 Nous reviendrons plus précisément sur ces limites fiscales aux sanctions 265 00:15:20,140 --> 00:15:23,460 finalement, limites en tout cas, issues de la Constitution. 266 00:15:24,220 --> 00:15:27,760 Même chose en quelques mots, s'agissant des pouvoirs d'investigation 267 00:15:27,960 --> 00:15:33,400 de l'administration fiscale de contrôle, puisque, c'est un troisième 268 00:15:33,600 --> 00:15:36,060 paragraphe, mais ce sera aussi une partie que nous verrons un 269 00:15:36,260 --> 00:15:39,220 petit peu plus tard au titre des différentes procédures, 270 00:15:39,820 --> 00:15:43,400 simplement ajoutons, soulignons à ce stade, 271 00:15:43,620 --> 00:15:48,220 au titre de ce très bref troisième paragraphe, une sorte d'idée générale 272 00:15:48,420 --> 00:15:52,200 là encore, qui est que l'ensemble des procédures de contrôle et 273 00:15:52,400 --> 00:15:59,460 d'investigation que l'administration fiscale connaît pour pouvoir procéder 274 00:15:59,660 --> 00:16:03,900 à ces investigations, à ces missions finalement, 275 00:16:04,300 --> 00:16:07,480 conduisant à essayer de détecter d'éventuelles erreurs au fond du 276 00:16:07,680 --> 00:16:11,120 contribuable, l'ensemble de ces pouvoirs sont fondés sur des 277 00:16:11,320 --> 00:16:14,940 dispositions législatives qui par principe sont attentatoires aux 278 00:16:15,140 --> 00:16:15,900 libertés publiques. 279 00:16:16,100 --> 00:16:19,940 Il y a toujours derrière une procédure de contrôle, évidemment une atteinte 280 00:16:20,140 --> 00:16:22,960 à la liberté, puisqu'il s'agit toujours de collecter des informations 281 00:16:23,160 --> 00:16:25,880 de manière plus ou moins intrusive, et parfois très intrusive, 282 00:16:26,080 --> 00:16:29,040 comme on le verra par exemple avec le droit de visite et de saisie, 283 00:16:29,260 --> 00:16:32,140 qui est en fait un droit de perquisition qui appartient à 284 00:16:32,340 --> 00:16:35,760 l'administration fiscale, donc une atteinte forcément aux 285 00:16:35,960 --> 00:16:39,480 libertés publiques et donc une exigence d'une intervention 286 00:16:39,680 --> 00:16:40,440 législative. 287 00:16:40,640 --> 00:16:43,780 Alors le Conseil constitutionnel est régulièrement saisi de ces 288 00:16:43,980 --> 00:16:50,220 dispositifs de contrôle qu'il peut apprécier, alors sur le fondement 289 00:16:50,420 --> 00:16:58,100 notamment de l'article 66 de la Constitution relatif aux libertés 290 00:16:58,300 --> 00:17:02,020 fondamentales telles que donc la Constitution le consacre, 291 00:17:03,300 --> 00:17:06,720 et également sur le fondement des autres dispositions et de la 292 00:17:06,920 --> 00:17:09,440 Constitution et la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen 293 00:17:10,240 --> 00:17:14,100 en lien avec les libertés fondamentales, mais, 294 00:17:14,300 --> 00:17:16,780 et c'est simplement ça que je veux souligner à ce stade, 295 00:17:17,140 --> 00:17:21,880 dans l'ensemble, pour l'essentiel, le Conseil constitutionnel se montre 296 00:17:22,080 --> 00:17:24,900 assez coulant, si je puis dire, avec le législateur, 297 00:17:25,280 --> 00:17:28,120 lorsque celui-ci met en œuvre des dispositifs de contrôle, 298 00:17:28,580 --> 00:17:32,760 ajoute de nouveaux dispositifs aux anciens, avec l'idée selon 299 00:17:32,960 --> 00:17:36,880 laquelle l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre 300 00:17:37,080 --> 00:17:40,120 la fraude et l'évasion fiscale auquel il est souvent fait référence 301 00:17:40,320 --> 00:17:42,740 dans la jurisprudence constitutionnelle, vient justifier 302 00:17:42,940 --> 00:17:44,500 la plupart de ces dispositifs. 303 00:17:44,700 --> 00:17:47,360 Il y a quelques cas d'annulation, mais relativement marginaux. 304 00:17:47,840 --> 00:17:52,060 Et je cite simplement un considérant que je crois encore aujourd'hui 305 00:17:52,260 --> 00:17:56,920 très parlant d'une décision du 29 décembre 1983 qui avait conduit, 306 00:17:57,460 --> 00:18:00,260 donc il y a maintenant quand même une quarantaine d'années, 307 00:18:00,560 --> 00:18:04,840 le Conseil constitutionnel à avoir cette phrase assez définitive, 308 00:18:05,040 --> 00:18:07,960 je crois, selon laquelle, je le cite, « L'exercice des libertés 309 00:18:08,160 --> 00:18:11,060 et droits individuels ne saurait en rien excuser la fraude fiscale 310 00:18:11,260 --> 00:18:12,460 ni en entraver la légitime répression ». 311 00:18:12,660 --> 00:18:16,340 Avec presque une sorte de renversement de la charge de la preuve, 312 00:18:17,140 --> 00:18:20,060 les libertés et droits individuels deviennent finalement une sorte 313 00:18:20,260 --> 00:18:25,200 de portion congrue lorsque la légitime répression de la fraude fiscale 314 00:18:25,400 --> 00:18:29,160 devient finalement l'argument massue qui permet d'effacer les libertés 315 00:18:29,360 --> 00:18:30,120 individuelles. 316 00:18:30,320 --> 00:18:32,260 Alors je caricature un peu dans l'interprétation et la lecture 317 00:18:32,460 --> 00:18:35,220 que je fais de ce considérant de la décision de 1983, 318 00:18:35,420 --> 00:18:41,100 mais on retrouve bien aujourd'hui en réalité le primat de cet objectif 319 00:18:41,300 --> 00:18:43,120 de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude et l'évasion 320 00:18:43,320 --> 00:18:46,620 fiscale dans de nombreuses décisions, mais c'est tout à fait à la fois 321 00:18:46,820 --> 00:18:49,460 légitime et sans doute justifié et parfaitement acceptable, 322 00:18:49,940 --> 00:18:52,900 et ce surtout lorsque, comme on le verra, l'on sait que 323 00:18:53,100 --> 00:18:56,100 le Parlement a en général le souci tout de même d'assortir d'un certain 324 00:18:56,300 --> 00:18:58,660 nombre de garanties, et parfois des garanties très solides 325 00:18:58,860 --> 00:19:02,480 sur le plan notamment procédural, les différents mécanismes qui sont 326 00:19:02,680 --> 00:19:05,540 confiés à l'administration fiscale pour conduire ces opérations de 327 00:19:05,740 --> 00:19:06,500 contrôle. 328 00:19:06,780 --> 00:19:10,160 La France reste un pays quand même extrêmement respectueux, 329 00:19:10,400 --> 00:19:12,760 me semble-t-il, des garanties des contribuables sur un certain nombre 330 00:19:12,960 --> 00:19:15,800 de points essentiels, comme on le précisera à nouveau 331 00:19:16,000 --> 00:19:16,760 un peu plus tard. 332 00:19:16,960 --> 00:19:20,220 Alors le tout dernier point, et je terminerai avec cet élément 333 00:19:20,420 --> 00:19:24,340 au titre des sources constitutionnelles, dans un bref 334 00:19:24,540 --> 00:19:27,800 paragraphe 4, c'est la question des limites à la complexité excessive 335 00:19:28,000 --> 00:19:28,760 de la loi fiscale. 336 00:19:29,220 --> 00:19:31,160 Alors il se trouve que, je le cite un peu vite et presque 337 00:19:31,360 --> 00:19:35,220 aujourd'hui pour mémoire, mais cette question de la complexité 338 00:19:35,420 --> 00:19:37,800 de la loi fiscale a suscité une intéressante décision, 339 00:19:38,000 --> 00:19:42,320 qui date un peu aujourd'hui puisqu'elle est de 2005, du Conseil 340 00:19:42,520 --> 00:19:47,340 constitutionnel, c'était le 29 décembre 2005, c'était la loi de 341 00:19:47,540 --> 00:19:51,800 finances pour 2006, puisque dans cette décision, le Conseil avait 342 00:19:52,000 --> 00:19:55,080 été confronté à un mécanisme alors qu'il sur le papier était assez 343 00:19:55,280 --> 00:20:00,020 sympathique disons cela comme ça, qui consistait à tenter de mettre 344 00:20:00,220 --> 00:20:05,600 une limite globale au niveau des avantages fiscaux susceptibles 345 00:20:05,800 --> 00:20:10,460 d'être perçus par un contribuable au titre des multiples niches fiscales 346 00:20:10,660 --> 00:20:11,760 en matière d'impôt sur le revenu. 347 00:20:11,960 --> 00:20:14,980 Donc l'idée était de limiter les cadeaux fiscaux globalement qu'un 348 00:20:15,180 --> 00:20:18,200 contribuable pouvait tirer des différents mécanismes qu'il aurait 349 00:20:18,400 --> 00:20:19,160 souhaité exploiter. 350 00:20:20,060 --> 00:20:24,480 Sauf que la rédaction du dispositif était abominable de complexité 351 00:20:25,200 --> 00:20:29,000 et c'était difficile de faire autrement puisqu'il fallait que l'article 352 00:20:29,200 --> 00:20:33,100 en question finalement se réfère à quelque chose comme 80, 353 00:20:33,300 --> 00:20:36,980 si ma mémoire est bonne, mécanismes de niches fiscales présents 354 00:20:37,180 --> 00:20:40,840 dans le Code général des impôts et donc qui venaient à être impactés 355 00:20:41,040 --> 00:20:43,120 si je puis dire par le nouveau dispositif. 356 00:20:43,320 --> 00:20:46,240 Et donc l'article faisait des renvois dans tous les sens absolument 357 00:20:46,440 --> 00:20:50,140 illisibles et le Conseil constitutionnel a peut-être pris 358 00:20:50,340 --> 00:20:55,420 un peu prétexte de ce dispositif pour poser une nouvelle norme, 359 00:20:55,620 --> 00:20:58,880 mais pas si nouvelle que ça parce qu'en réalité elle s'inspire de 360 00:20:59,080 --> 00:21:01,880 plusieurs dispositions qu'il avait déjà appliquées de la Constitution 361 00:21:02,080 --> 00:21:04,240 comme de la Déclaration des droits de l'homme pour considérer, 362 00:21:04,440 --> 00:21:08,700 et je cite sa formule qui est un peu troublante, qu'un dispositif 363 00:21:08,900 --> 00:21:13,040 fiscal doit être invalidé, ce fut le cas ici, lorsqu'il est 364 00:21:13,240 --> 00:21:16,800 caractérisé par, je cite, une complexité excessive et non 365 00:21:17,000 --> 00:21:19,180 justifiée par un motif d'intérêt général suffisant. 366 00:21:19,380 --> 00:21:21,620 Alors le « et » suggère qu'a contrario, 367 00:21:21,820 --> 00:21:25,280 un dispositif d'une complexité excessive pourrait être justifié 368 00:21:25,480 --> 00:21:27,740 par un motif d'intérêt général suffisant et donc être conforme 369 00:21:27,940 --> 00:21:28,700 à la Constitution. 370 00:21:29,000 --> 00:21:32,300 Bon, il se trouve que depuis cette décision, jamais le Conseil 371 00:21:32,500 --> 00:21:36,000 constitutionnel n'a à nouveau annulé de dispositifs fiscaux sur ce 372 00:21:36,200 --> 00:21:40,700 fondement, mais retenons en tout cas que le Conseil vient apprécier 373 00:21:40,900 --> 00:21:46,700 la rédaction de la législation fiscale et ne s'interdit pas, 374 00:21:46,900 --> 00:21:49,740 au-delà d'un certain niveau de complexité et en l'absence de 375 00:21:49,940 --> 00:21:52,680 justification d'intérêt général de cette complexité, ne s'interdit 376 00:21:52,880 --> 00:21:55,920 pas d'annuler un tel mécanisme fiscal. 377 00:21:56,420 --> 00:21:58,920 Alors, je termine là-dessus, la notion de clarté et 378 00:21:59,120 --> 00:22:01,660 d'intelligibilité de la loi est déjà tirée par le Conseil 379 00:22:01,860 --> 00:22:03,820 constitutionnel de l'article 16 de la Déclaration et trouve à 380 00:22:04,020 --> 00:22:08,340 s'appliquer de temps en temps dans sa jurisprudence, en général pour 381 00:22:08,540 --> 00:22:11,680 faire des reproches au législateur sans en tirer toutes les conséquences, 382 00:22:11,880 --> 00:22:13,820 c'est-à-dire sans annuler les dispositifs. 383 00:22:14,700 --> 00:22:20,140 Il se trouve, et on a déjà vu ce point, je crois, tout au début de cette 384 00:22:20,340 --> 00:22:25,660 session, évidemment en matière fiscale, la complexité est presque inhérente 385 00:22:25,860 --> 00:22:29,580 à la loi fiscale, dans un souci, on l'a vu, de justice et pour adapter 386 00:22:29,780 --> 00:22:32,810 au plus finement la loi fiscale aux différentes situations des 387 00:22:33,010 --> 00:22:36,060 contribuables que le législateur est contraint, en effet, 388 00:22:36,260 --> 00:22:40,640 d'amener beaucoup de complexité, de sorte que le procès fréquemment 389 00:22:40,840 --> 00:22:44,320 fait à la complexité de la loi fiscale n'est pas nécessairement 390 00:22:44,520 --> 00:22:49,900 un bon procès, et n'est pas non plus forcément toujours un mauvais 391 00:22:50,100 --> 00:22:53,640 procès, vous m'avez compris, il y a évidemment des arguments 392 00:22:53,840 --> 00:22:57,420 qui consistent à dire que la clarté c'est mieux, mais dans un certain 393 00:22:57,620 --> 00:23:00,500 nombre de cas la clarté est impossible, ou en tout cas extrêmement difficile, 394 00:23:00,860 --> 00:23:04,560 de sorte qu'annuler tous les dispositifs complexes serait 395 00:23:04,760 --> 00:23:06,920 complètement délirant, sauf arriver à un système fiscal 396 00:23:07,120 --> 00:23:09,460 où tout le monde paierait exactement la même chose, ce qui en termes 397 00:23:09,660 --> 00:23:11,680 de justice ne serait sans doute pas idéal. 398 00:23:11,940 --> 00:23:16,560 Enfin donc, soulignons simplement l'existence de cette norme relative 399 00:23:16,760 --> 00:23:20,200 à la qualité de la rédaction de la loi fiscale sans y attacher 400 00:23:20,400 --> 00:23:22,880 une portée excessive, depuis 2005, je le répète, 401 00:23:23,080 --> 00:23:26,620 elle n'a jamais trouvé à être effectivement mise en œuvre avec 402 00:23:26,820 --> 00:23:30,320 une annulation à la clé par le Conseil constitutionnel, et nous 403 00:23:30,520 --> 00:23:34,260 en avons donc fini avec la présentation des normes de valeur constitutionnelle.