1 00:00:05,100 --> 00:00:09,540 Venons-en maintenant au contenu de la légalité une fois que nous 2 00:00:09,740 --> 00:00:13,580 avons vu cette métanorme qu'est le principe de légalité. 3 00:00:13,780 --> 00:00:16,540 Section 2 : le contenu de la légalité. 4 00:00:17,540 --> 00:00:21,520 Je vous le disais, le principe de légalité ne renvoie pas seulement 5 00:00:21,720 --> 00:00:23,940 à la loi, à la légalité au sens strict. 6 00:00:24,640 --> 00:00:29,600 La légalité administrative est un ensemble bien plus vaste de normes, 7 00:00:29,800 --> 00:00:32,840 de valeurs différentes qui s'imposent à l'administration. 8 00:00:33,340 --> 00:00:37,980 Il y a des normes constitutionnelles, des normes internationales et 9 00:00:38,180 --> 00:00:42,360 européennes, des normes législatives et réglementaires et des normes 10 00:00:42,560 --> 00:00:43,320 jurisprudentielles. 11 00:00:43,520 --> 00:00:49,640 Voyons ces quatre strates de normes qui s'appliquent à l'administration 12 00:00:49,840 --> 00:00:53,480 et qui constituent ce que l'on appelle la légalité administrative. 13 00:00:54,920 --> 00:00:55,680 I. 14 00:00:56,220 --> 00:01:00,120 Commençons cette semaine par les normes constitutionnelles. 15 00:01:00,320 --> 00:01:07,880 L'administration est soumise à la Constitution et aux normes qui 16 00:01:08,080 --> 00:01:12,720 sont rattachées à la Constitution que l'on qualifie dans son ensemble 17 00:01:12,920 --> 00:01:15,100 de bloc de constitutionnalité. 18 00:01:16,540 --> 00:01:21,320 Dans ce grand I, je voudrais d'abord parler du contenu des normes 19 00:01:21,520 --> 00:01:26,560 constitutionnelles, car c'est un ensemble assez diversifié de règles, 20 00:01:27,320 --> 00:01:32,020 avant de parler du contrôle de constitutionnalité des actes 21 00:01:32,220 --> 00:01:32,980 administratifs. 22 00:01:33,240 --> 00:01:34,000 A. 23 00:01:34,200 --> 00:01:36,560 Le contenu des normes constitutionnelles. 24 00:01:37,400 --> 00:01:49,880 Je vais ici retracer l'évolution qui a consisté à diversifier les 25 00:01:50,080 --> 00:01:56,040 normes qui relèvent de la constitution, à densifier ces normes 26 00:01:56,240 --> 00:01:57,000 constitutionnelles. 27 00:01:58,600 --> 00:02:02,360 Au cours de l'histoire, en effet, se sont ajoutées, 28 00:02:02,560 --> 00:02:07,240 à la Constitution au sens strict, d'autres règles, le préambule de 29 00:02:07,440 --> 00:02:13,380 la Constitution, la déclaration de 1789, des principes fondamentaux, 30 00:02:13,580 --> 00:02:14,340 etc. 31 00:02:14,540 --> 00:02:16,960 Je vais revenir sur ces différentes catégories de règles. 32 00:02:17,160 --> 00:02:20,300 Dans un premier temps, le Conseil d'État a soumis 33 00:02:20,500 --> 00:02:24,660 l'administration à la Constitution au sens strict, c'est-à-dire à 34 00:02:24,860 --> 00:02:29,540 l'ensemble des articles qui sont contenus dans la Constitution au 35 00:02:29,740 --> 00:02:30,500 sens formel. 36 00:02:31,280 --> 00:02:34,960 C'est une jurisprudence du Conseil d'État qui est aujourd'hui ancienne 37 00:02:35,160 --> 00:02:36,920 puisqu'elle date de la Troisième République. 38 00:02:38,320 --> 00:02:45,000 Je citerai ici un arrêt dont j'ai déjà parlé, l'arrêt sieur Labonne, 39 00:02:45,200 --> 00:02:50,360 1919, décision dans laquelle le 40 00:02:50,560 --> 00:02:53,360 Conseil d'État a jugé qu'un décret du président de la République, 41 00:02:53,640 --> 00:02:57,440 qui réglementait, je vous le rappelle, la circulation automobile, 42 00:02:59,280 --> 00:03:02,040 découlait de l'utilisation par le président de la République de 43 00:03:02,240 --> 00:03:04,660 ses pouvoirs propres, même en l'absence de loi, 44 00:03:04,860 --> 00:03:10,300 pouvoirs propres qui découlent de la loi constitutionnelle du 45 00:03:10,500 --> 00:03:14,920 25 février 1875, de la Constitution de la Troisième République. 46 00:03:15,980 --> 00:03:20,040 Donc ici, dans cette affaire, Sieur Labonne, le Conseil d'État 47 00:03:20,240 --> 00:03:28,740 a appliqué la constitution pour juger de la légalité de l'action 48 00:03:28,940 --> 00:03:32,740 administrative, de la légalité de la décision du président de 49 00:03:32,940 --> 00:03:33,700 la République. 50 00:03:33,900 --> 00:03:38,680 Donc ici, vous voyez bien que même si le juge administratif constate 51 00:03:38,880 --> 00:03:45,540 la légalité de ce décret du président de la République, le juge applique 52 00:03:45,740 --> 00:03:47,300 effectivement la Constitution. 53 00:03:47,680 --> 00:03:52,440 D'ailleurs, il vise précisément la Constitution dans sa décision. 54 00:03:53,440 --> 00:03:56,920 C'est une jurisprudence assez ancienne et qui finalement n'a pas grand-chose 55 00:03:57,120 --> 00:03:57,880 d'exceptionnelle. 56 00:03:58,080 --> 00:04:03,600 La Constitution fixe les pouvoirs de certaines autorités administratives, 57 00:04:03,800 --> 00:04:07,660 notamment aujourd'hui le Premier ministre, le président de la 58 00:04:07,860 --> 00:04:14,700 République, ont des pouvoirs qu'ils exercent sur le fondement de la 59 00:04:14,900 --> 00:04:20,060 Constitution, donc la Constitution régit l'action de certaines autorités 60 00:04:20,260 --> 00:04:21,160 administratives. 61 00:04:22,080 --> 00:04:25,660 Le juge administratif, cela n'a donc rien d'extraordinaire, 62 00:04:26,040 --> 00:04:29,360 applique la Constitution à ces autorités, donc l'action est régie 63 00:04:29,560 --> 00:04:30,320 par la Constitution. 64 00:04:31,080 --> 00:04:35,320 Il y aurait bien d'autres exemples à citer, je ne cite ici que l'arrêt 65 00:04:35,520 --> 00:04:36,280 sieur Labonne. 66 00:04:37,240 --> 00:04:40,380 On en est donc sous la Troisième République à une application de 67 00:04:40,580 --> 00:04:45,840 la constitution au sens strict, de ces articles effectifs qui se 68 00:04:46,040 --> 00:04:47,700 trouvent dans le texte constitutionnel. 69 00:04:47,900 --> 00:04:50,860 Mais à partir de la Quatrième République, les normes 70 00:04:51,060 --> 00:04:55,940 constitutionnelles vont se diversifier et on va voir l'apparition d'un 71 00:04:56,140 --> 00:04:59,520 bloc de constitutionnalité composé de normes différentes, 72 00:05:00,380 --> 00:05:01,340 un bloc composite. 73 00:05:03,420 --> 00:05:07,620 Un premier exemple de cette diversification, c'est l'arrêt 74 00:05:07,820 --> 00:05:13,240 Dehaene dont j'ai déjà parlé aussi, arrêt de 1950, qui concerne le 75 00:05:13,440 --> 00:05:17,000 principe de, je vous le rappelle, continuité des services publics. 76 00:05:17,820 --> 00:05:22,020 Dans cette affaire, vous vous souvenez que le Conseil d'État a fait 77 00:05:22,220 --> 00:05:25,960 application du préambule de la Constitution de 1946, 78 00:05:26,740 --> 00:05:33,500 préambule qui auparavant était considéré comme extérieur à la 79 00:05:33,700 --> 00:05:34,800 Constitution au sens strict. 80 00:05:35,100 --> 00:05:37,680 Je vous le disais, sous la Troisième République, le juge appliquait 81 00:05:37,880 --> 00:05:40,520 la Constitution au sens strict, formel. 82 00:05:41,220 --> 00:05:46,200 À partir de la Quatrième République, le Conseil d'État prend aussi ce 83 00:05:46,400 --> 00:05:51,000 texte qui est un peu en dehors de la Constitution, que l'on appelle 84 00:05:51,200 --> 00:05:52,160 le préambule. 85 00:05:53,100 --> 00:05:55,300 Dans l'arrêt Dehaene, je vous le rappelle, 86 00:05:55,500 --> 00:05:59,060 le Conseil d'État a utilisé le droit de grève qui est consacré 87 00:05:59,260 --> 00:06:06,360 par le préambule de 1946, droit de grève qui s'applique aussi 88 00:06:06,560 --> 00:06:12,520 à l'administration, administration qui doit tolérer la grève de ses 89 00:06:12,720 --> 00:06:18,460 agents à condition que cela ne nuise pas à la continuité du service 90 00:06:18,660 --> 00:06:19,420 public. 91 00:06:19,820 --> 00:06:24,000 Le Conseil d'État va aller beaucoup plus loin dans une décision, 92 00:06:24,200 --> 00:06:28,880 toujours sous la Quatrième République, dans une décision Amicale des Annamites 93 00:06:29,080 --> 00:06:32,520 de Paris rendue le 11 juillet 1956. 94 00:06:33,120 --> 00:06:40,780 En l'espèce, le ministre de l'Intérieur avait interdit à Monsieur 95 00:06:41,020 --> 00:06:48,000 Nguyen-Duc-Frang la création d'une association, l'association Amicale 96 00:06:48,200 --> 00:06:51,700 des Annamites de Paris, avait interdit la constitution 97 00:06:51,900 --> 00:06:56,320 de cette association sur le fondement d'un décret-loi de 1939 relatif 98 00:06:56,520 --> 00:06:57,800 aux associations étrangères. 99 00:06:59,140 --> 00:07:06,080 Monsieur Nguyen-Duc-Frang conteste cette interdiction devant le Conseil 100 00:07:06,280 --> 00:07:10,480 d'État, l'arrêté qui lui empêche de constituer son association, 101 00:07:11,540 --> 00:07:20,180 et le Conseil d'État doit se prononcer sur la validité de cet arrêté. 102 00:07:20,900 --> 00:07:28,500 Monsieur Nguyen-Duc-Frang était un ressortissant vietnamien à l'époque 103 00:07:28,700 --> 00:07:32,180 où le Vietnam était un protectorat français, il faisait donc partie 104 00:07:32,380 --> 00:07:33,880 de l'Union française. 105 00:07:34,600 --> 00:07:38,600 Se posait donc une première question : le ministre de l'Intérieur pouvait-il 106 00:07:38,800 --> 00:07:45,420 appliquer un décret-loi relatif aux associations étrangères à une 107 00:07:45,620 --> 00:07:50,960 personne ressortissante d'un pays placé sous protectorat français, 108 00:07:51,380 --> 00:07:53,000 donc un pays qui relève de l'Union française ? 109 00:07:53,400 --> 00:07:55,280 Réponse du Conseil d'État : Non. 110 00:07:55,720 --> 00:07:59,120 "Les ressortissants du Vietnam sont liés à la France, 111 00:07:59,600 --> 00:08:02,240 et même s'il existe une forme d'indépendance du Vietnam, 112 00:08:03,020 --> 00:08:08,780 ils relèvent – les Vietnamiens – de l'Union française et ne peuvent 113 00:08:09,060 --> 00:08:11,600 pas être considérés comme des étrangers". 114 00:08:11,900 --> 00:08:16,300 Les associations des personnes ressortissantes du Vietnam peuvent 115 00:08:16,500 --> 00:08:19,960 créer des associations sans être contrôlées sur le fondement de 116 00:08:20,160 --> 00:08:23,060 ce décret-loi sur les associations étrangères. 117 00:08:23,820 --> 00:08:27,940 Mais se posait une deuxième question : Monsieur Nguyen-Duc-Frang, 118 00:08:28,220 --> 00:08:32,380 ressortissant vietnamien, pouvait-il bénéficier de la liberté 119 00:08:32,580 --> 00:08:34,900 d'association dont bénéficient les autres Français ? 120 00:08:36,540 --> 00:08:38,140 La réponse du Conseil d'État est la suivante. 121 00:08:38,340 --> 00:08:48,340 D'abord, l'article 81 de la Constitution de 1946 prévoit que 122 00:08:48,540 --> 00:08:50,920 tous les nationaux français et les ressortissants de l'Union 123 00:08:51,120 --> 00:08:54,240 française, dont faisait partie Monsieur Nguyen-Duc-Frang, ont 124 00:08:54,440 --> 00:08:57,960 la qualité de citoyens de l'Union française qui leur assurent la 125 00:08:58,160 --> 00:09:03,060 jouissance des droits et libertés garantis par le préambule de la 126 00:09:03,260 --> 00:09:04,020 Constitution. 127 00:09:04,700 --> 00:09:08,680 Il fallait savoir si, en l'espèce, il y avait bien dans 128 00:09:08,880 --> 00:09:14,280 le préambule de 1946 une liberté d'association. 129 00:09:15,780 --> 00:09:21,200 Pas de manière explicite, mais le Conseil d'État décide tout 130 00:09:21,400 --> 00:09:26,020 de même que le préambule de 1946 consacre la liberté d'association 131 00:09:26,220 --> 00:09:36,200 lorsqu'il estime que les principes 132 00:09:36,400 --> 00:09:43,240 fondamentaux reconnus par les lois de la République sont des droits 133 00:09:43,440 --> 00:09:48,060 qui relèvent du préambule de 1946 et que la liberté d'association 134 00:09:48,260 --> 00:09:52,700 est un principe justement fondamental reconnu par une loi de la République, 135 00:09:53,340 --> 00:09:56,380 la loi de 1901 sur les associations. 136 00:09:56,580 --> 00:09:59,240 Je récapitule le raisonnement du Conseil d'État. 137 00:09:59,440 --> 00:10:05,920 La loi de 1901 crée la liberté d'association, liberté d'association 138 00:10:06,120 --> 00:10:09,520 qui est un principe fondamental reconnu par une loi de la République, 139 00:10:10,860 --> 00:10:13,700 principes fondamentaux reconnus par les lois de la République qui 140 00:10:13,900 --> 00:10:20,280 apparaissent au sein du préambule de 1946, préambule de 1946 qui 141 00:10:20,480 --> 00:10:26,000 s'applique à tous les Français et aux citoyens de l'Union française, 142 00:10:26,200 --> 00:10:32,000 dont Monsieur Nguyen-Duc-Frang fait partie, donc Monsieur 143 00:10:32,520 --> 00:10:35,700 Nguyen-Duc-Frang, le requérant, pouvait invoquer la liberté 144 00:10:35,900 --> 00:10:41,400 d'association pour demander au 145 00:10:41,600 --> 00:10:46,040 Conseil d'État de censurer l'acte pris par le ministre de l'Intérieur 146 00:10:46,240 --> 00:10:48,180 à l'encontre de son association. 147 00:10:52,720 --> 00:10:57,560 Durant la Quatrième République, ont valeur constitutionnelle, 148 00:10:58,060 --> 00:11:02,980 la Constitution elle-même évidemment, le préambule de la Constitution, 149 00:11:03,680 --> 00:11:06,540 c'est ce que nous dit l'arrêt Dehaene sur le droit de grève, 150 00:11:07,380 --> 00:11:11,740 ainsi que les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, 151 00:11:12,080 --> 00:11:16,560 ce qui étend encore le champ du préambule de 1946 puisqu'il y a 152 00:11:16,760 --> 00:11:21,620 des droits et libertés qui ne sont pas effectivement inscrits au sein 153 00:11:21,820 --> 00:11:24,960 du préambule de 1946, mais qui relèvent des principes 154 00:11:25,160 --> 00:11:28,020 fondamentaux reconnus par les lois de la République auxquels renvoie 155 00:11:28,220 --> 00:11:29,260 le préambule de 1946. 156 00:11:29,460 --> 00:11:37,740 Le Conseil d'État ajoute d'ailleurs aux règles qui ont valeur 157 00:11:37,940 --> 00:11:42,780 constitutionnelle, les articles de la Déclaration des droits de 158 00:11:42,980 --> 00:11:48,500 l'homme et du citoyen de 1789, c'est un arrêt de 1957 Condamine. 159 00:11:49,500 --> 00:11:54,260 En l'espèce, le Conseil d'État a contrôlé un arrêté d'expulsion 160 00:11:54,460 --> 00:11:59,240 d'un ressortissant étranger par rapport à la Déclaration de 1789, 161 00:12:02,180 --> 00:12:08,380 la raison étant que la Déclaration de 1789 est mentionnée, 162 00:12:08,580 --> 00:12:10,900 comme les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, 163 00:12:12,060 --> 00:12:14,480 au sein du préambule de 1946. 164 00:12:14,960 --> 00:12:17,540 La Constitution elle-même, le préambule de 1946, 165 00:12:18,260 --> 00:12:21,740 et au sein du préambule de 1946, les principes fondamentaux reconnus 166 00:12:21,940 --> 00:12:25,720 par les lois de la République et la Déclaration de 1789. 167 00:12:26,680 --> 00:12:33,000 Après 1958, le Conseil d'État reprend 168 00:12:33,200 --> 00:12:39,980 toute sa jurisprudence et étend encore le champ des normes 169 00:12:40,180 --> 00:12:40,940 constitutionnelles. 170 00:12:41,140 --> 00:12:48,460 En effet, le Conseil d'État constate que le préambule de 1958 dispose 171 00:12:48,660 --> 00:12:53,340 que le peuple français proclame solennellement son attachement 172 00:12:53,540 --> 00:12:55,880 aux droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale, 173 00:12:56,080 --> 00:12:59,640 tel qu'ils ont été définis par la Déclaration de 1789, 174 00:13:00,360 --> 00:13:05,100 premier renvoi, confirmé et complété par le préambule de la Constitution 175 00:13:05,300 --> 00:13:07,400 de 1946, deuxième renvoi. 176 00:13:07,990 --> 00:13:13,180 Le Conseil d'État redonne en quelque sorte valeur constitutionnelle 177 00:13:13,380 --> 00:13:18,500 au préambule de 1958 et redonne, par la même voie, valeur 178 00:13:18,700 --> 00:13:24,480 constitutionnelle à la Déclaration de 1789 et au préambule de 1946. 179 00:13:24,680 --> 00:13:28,540 Par conséquent, aujourd'hui, le préambule de 1958, 180 00:13:29,060 --> 00:13:32,100 qui est une norme de référence du contrôle, renvoie à d'autres 181 00:13:32,300 --> 00:13:35,600 normes de référence du contrôle de l'administration, la Déclaration 182 00:13:35,800 --> 00:13:40,840 de 1789, le préambule de 1946 et même les principes fondamentaux 183 00:13:41,040 --> 00:13:44,780 reconnus par les lois de la République qui sont mentionnés au sein du 184 00:13:44,980 --> 00:13:45,740 préambule de 1946. 185 00:13:46,240 --> 00:13:51,120 Il y a une sorte de jeu de renvoi systématique, préambule de 1958, 186 00:13:51,420 --> 00:13:55,980 préambule de 1946, principes fondamentaux reconnus par les lois 187 00:13:56,180 --> 00:13:56,940 de la République. 188 00:13:57,400 --> 00:14:00,920 Je mentionnerai rapidement quelques arrêts qui justement reprennent 189 00:14:01,120 --> 00:14:01,880 ces principes. 190 00:14:02,080 --> 00:14:04,920 Vous avez notamment, pour la Déclaration de 1789, 191 00:14:05,420 --> 00:14:12,820 un arrêt postérieur à 1958, 12 février 1960, société Eky. 192 00:14:13,560 --> 00:14:16,280 S'agissant des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, 193 00:14:16,680 --> 00:14:22,260 on a la décision du Conseil d'État du 3 juillet 1996, Koné, 194 00:14:22,460 --> 00:14:23,740 décision très importante. 195 00:14:24,510 --> 00:14:28,860 Le Conseil d'État reconnaît, comme principe fondamental reconnu 196 00:14:29,060 --> 00:14:34,600 par les lois de la République, l'obligation pour l'État de refuser 197 00:14:34,800 --> 00:14:40,840 l'extradition d'un étranger vers un pays où l'extradition est demandée 198 00:14:41,040 --> 00:14:45,520 dans un but politique, pour condamner une personne 199 00:14:45,720 --> 00:14:48,940 ressortissante de ce pays dans un but politique. 200 00:14:50,800 --> 00:14:54,780 Le Conseil constitutionnel, je mentionnerai ça pour terminer 201 00:14:54,980 --> 00:14:59,080 avec un autre élément quand même, le Conseil constitutionnel a repris 202 00:14:59,280 --> 00:15:00,440 le raisonnement du Conseil d'État. 203 00:15:01,060 --> 00:15:04,380 C'est la très fameuse décision que vous devez connaître déjà, 204 00:15:04,580 --> 00:15:07,960 la décision Liberté d'Association de 1971. 205 00:15:08,900 --> 00:15:13,960 Le Conseil constitutionnel a repris le raisonnement qui a été adopté 206 00:15:14,160 --> 00:15:16,740 par le Conseil d'État sous la Quatrième République. 207 00:15:17,800 --> 00:15:22,580 Dans sa décision liberté d'association, le Conseil constitutionnel décide 208 00:15:22,780 --> 00:15:27,080 que le préambule de 58 a une valeur constitutionnelle, que ce préambule 209 00:15:27,280 --> 00:15:32,180 de 58 renvoie au préambule de 46 qui lui aussi a encore une valeur 210 00:15:32,380 --> 00:15:36,120 constitutionnelle, préambule de 46 qui mentionne les principes 211 00:15:36,320 --> 00:15:39,600 fondamentaux reconnus par les lois de la République qui ont eux aussi 212 00:15:39,800 --> 00:15:43,940 valeur constitutionnelle, notamment la liberté d'association 213 00:15:44,140 --> 00:15:48,720 consacrée par la loi de 1901 a une valeur constitutionnelle qui 214 00:15:48,920 --> 00:15:56,660 s'applique, principe qui s'impose donc, dirais-je même, au législateur en 1971. 215 00:15:58,500 --> 00:16:03,520 Enfin, je mentionnerai une autre 216 00:16:03,720 --> 00:16:07,300 source qui aujourd'hui a une valeur constitutionnelle. 217 00:16:07,500 --> 00:16:16,840 La loi constitutionnelle du 1er mars 2005 a créé la Charte de 218 00:16:17,040 --> 00:16:20,200 l'environnement qu'elle a intégrée au préambule de 1958. 219 00:16:21,240 --> 00:16:23,900 Aujourd'hui, cette charte, considérée comme ayant une valeur 220 00:16:24,100 --> 00:16:28,160 constitutionnelle, s'impose à l'administration. 221 00:16:28,360 --> 00:16:33,560 C'est le sens de la décision du Conseil d'État du 3 octobre 2008, 222 00:16:33,760 --> 00:16:38,620 commune d'Annecy, je cite : "L'ensemble des droits et devoirs 223 00:16:38,820 --> 00:16:42,600 définis dans la Charte de l'environnement, à l'instar de 224 00:16:42,800 --> 00:16:45,700 toutes celles qui procèdent du préambule de la Constitution, 225 00:16:45,900 --> 00:16:51,920 ont valeur constitutionnelle et s'imposent sur cette base à 226 00:16:52,120 --> 00:16:52,880 l'administration". 227 00:16:53,140 --> 00:16:58,920 Je récapitule l'ensemble : ont valeur constitutionnelle la 228 00:16:59,120 --> 00:17:04,980 Constitution, le préambule de la Constitution de 1958 qui renvoie 229 00:17:05,180 --> 00:17:09,140 au préambule de la Constitution de 1946, qui prévoit par exemple le droit 230 00:17:09,340 --> 00:17:11,940 d'asile, la liberté syndicale, le droit de grève, etc. 231 00:17:12,840 --> 00:17:16,540 Au sein du préambule de 1946, les principes fondamentaux reconnus 232 00:17:16,740 --> 00:17:22,660 par les lois de la République, la déclaration de 1789 et aujourd'hui 233 00:17:22,860 --> 00:17:26,760 s'ajoute à tout cela la Charte de l'environnement de 2004 intégrée 234 00:17:26,960 --> 00:17:29,240 en 2005 au sein de la Constitution. 235 00:17:30,060 --> 00:17:34,740 On parle aujourd'hui, en raison de cette diversification 236 00:17:34,940 --> 00:17:39,760 des normes constitutionnelles, de constitutionnalisation du droit 237 00:17:39,960 --> 00:17:45,780 qui concerne non seulement le droit administratif, mais aussi le droit 238 00:17:45,980 --> 00:17:46,740 privé.